Poème 'Rêve du soir' de EricChaudre

« Vous savez certainement qu’adamantin veut dire : qui a l’éclat du diamant. Ce mot produit en moi une résonance particulière. »

M’élevant par delà les haies et les vallons
Dans l’air qu’un crépuscule dorait à son insu
Je vis des champs jaunis bordés de bois moussus
Et des routes de craie flâner dans les moissons.
La campagne était calme et défilait sous moi
L’écho d’une chapelle rythmait son seul émoi.
Quand le soir descend et que l’on est dehors
En longeant ces maisons dont brillent les fenêtres
Qui n’a pas eu envie d’y entrer et se mettre
Devant la cheminée, en un riant décors,
Changer en compagnons les gens de ce domaine
Qu’ils me disent qu’ils m’aiment et endorment ma peine.
Je vis ainsi briller au loin une lueur.
Pour fondre vers ce phare, comme le crécerelle,
J’aspirai l’air bleuté qui me séparait d’elle.
Les clarines des vaches qui rentrent à cette heure
Tintaient à mes oreilles et comme un sortilège
Répétaient leur écho en faisant mon cortège.
Une claire lanterne chassait de la chaumière
Les ombres au dehors. Tout brillait. J’étais sauf.
J’humai la douce odeur du potage qui chauffe,
Une cuiller de bois courrait dans la soupière
La chanson d’une mère berçait son rythme lent.
Les petits carreaux de toile cirée, rouges et blancs
Ensoleillaient la table. Par terre, ébahi,
Petit ange de blond dont le visage penche
Comme une fleur, on lit, dedans tes yeux pervenche,
Une attente, ou des pleurs ? C’est alors que jaillit
Comme ces sources vives qui font s’ouvrir mon cœur,
Le rire adamantin d’un enfant en bonheur.