Poème 'Cloches' de Georges RODENBACH dans 'La Jeunesse blanche'

Cloches

Georges RODENBACH
Recueil : "La Jeunesse blanche"

I

Le dimanche, attristé de cloches, remémore
Les bonheurs espérés et qu’on aura pas eus,
Les bonheurs dont, enfant, on parlait à Jésus
Dans l’église aux vitraux roses comme une aurore !
Car les cloches, avec leurs puériles voix,
Et leur cheminement qui trébuche si frêle,
- On dirait par moment d’une âme qui se fêle ! ?
Sont les rêves et les désirs de l’Autrefois,
Tant d’espoirs qu’on avait, tant de jeunes pensées,
Trop de tendres pour la vie et qui n’ont pas grandi,
Cloches, dès leur jeunesse, à la mort fiancées
Et qu’on revoit dans cette fin d’après-midi
Et qui s’en vont en cette fin d’un long dimanche
Finir parmi le Lune ouvrant sa tombe blanche.

II

Certains matins pascals, quand le ciel est d’azur,
- O cet azur d’avril qui n’est pas encore sûr ! ?
Les cloches font songer à des Communiantes
Dans des robes de mousseline anémiantes,
Dont la blancheur bouffante alanguirait le pas ;
Cloches de pureté qui s’éloignent, là-bas,
Infantes de Jésus qui lui sont fiancées,
Cloches en des ampleurs de jupes balancées
Dont on suit dans le vent le rythmique départ
Au delà de la vie, à travers le brouillard
Qui se déroule en beaux linges de Sainte Table
Et voici qu’on croirait dans l’aube délectable,
Dont la mysticité s’apparie à la leur,
Les voix s’agglomérer en robes de pâleur,
O cloches cheminant, si douces et câlines
Qu’elles semblent vraiment faites de mousselines !

1892

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Commentaires

  1. Remembrances d'un vieux roi de gueules
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    Un très vieux roi se remémore
    Tous les succès qu'il n'a pas eus ;
    C'est comme un rêve décousu,
    C'est comme un recueil d'oxymores.

    Surtout, il entend mille voix,
    Fortes parfois, et souvent frêles,
    Qui vont chantant la chanson grêle
    Des petits jardins d'autrefois.

    Sois en paix, vieux roi, c'est dimanche,
    Sois heureux sous la lune blanche.

  2. " Sois heureux sous la lune blanche."
    Sois heureux tout simplement.

  3. Cloches de jadis et de naguère
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    Sonnez pour moi, cloches de mon enfance ;
    Car votre son, comme dans le passé,
    Peut rétablir les liens qui sont cassés...
    Vous l’avez fait, dans plusieurs coins de France.

    Sonnez pour moi, cloches de mon errance,
    De mes écrits, des livres entassés ;
    Un jour d’école, il n’est pas effacé,
    De nos leçons nous avons souvenance.

    J’entends sonner une cloche bretonne,
    C’est élégant, c’est un son qui m’étonne,
    J’entends sonner la cloche de l’oubli.

    En traversant la place des Quinconces,
    Je me souviens des chemins pleins de ronces
    Qui, pour toujours, de douceur sont emplis.

  4. Les âges de la vie.

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Georges RODENBACH

Portait de Georges RODENBACH

Georges Rodenbach (né le 16 juillet 1855 à Tournai et mort le 25 décembre 1898 à Paris) était un poète symboliste et un romancier belge de la fin du XIXe siècle. Issu d’une famille bourgeoise d’origine allemande – son père, fonctionnaire au ministère de l’Intérieur, est vérificateur des poids et mesures ;... [Lire la suite]

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