Poème 'La Muse' de Hégésippe MOREAU dans 'Œuvres de Hégésippe Moreau'

La Muse

Hégésippe MOREAU
Recueil : "Œuvres de Hégésippe Moreau"

Nymphe, qui guettes au passage
L’écolier du pays latin,
Assez laide pour être sage,
Quel mauvais sort te fit catin ?
Hélas, répond, un peu confuse,
La courtisane au bas crotté,
Vous voyez une pauvre Muse ;
Soyez heureux par charité !

Ne riez pas, oui, de la Loire
J’égalais presque la Sapho ;
J’étais gentille, et l’auditoire,
Lorgnette en main, criait bravo.
D’un gros garçon et d’un poëme
J’enrichis la postérité.
Entre nous, le père est le même ;
Soyez heureux par charité !

À Paris, un journaliste ivre
Prôna mes vers qu’il ne lut pas,
Ce monsieur, pour juger mon livre,
Avait feuilleté mes appas.
Quand, d’une main, le bon apôtre
Brochait l’article à mon côté,
Dieu sait ce qu’il faisait de l’autre !…
Soyez heureux par charité !

Dans les salons je fus admise,
Mes conquêtes ont fait du bruit :
J’ai vu Lamartine en chemise
Et Byron en bonnet de nuit.
Sur mon sein traçant une épître,
En le baisant ils l’ont chanté.
Je mets en vente leur pupitre.
Soyez heureux par charité !

Mais survint une maladie,
Adieu la gloire, adieu l’amour !
Il fallut tomber, enlaidie,
De lord Byron à lord Seymour.
Je n’ai d’autre espoir que l’hospice,
Seul un roman frais édité.
Pauvre Muse ! Dieu te bénisse !
Soyez heureux par charité !

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Commentaires

  1. Célébration distraite
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    Buvons un coup au passage,
    Les bars du Quartier Latin
    Ne nous veulent point trop sages ;
    Ou bien, juste le matin.

    Buvons des vins de la Loire
    Ou parfois des verres d’eau ;
    Il n’est point question de gloire,
    Chacun boit ce qu’il lui faut.

    Il ne s’agit pas d’être ivres
    (On ne nous aimerait pas !)
    Mais bien d’être heureux de vivre
    Et d’embellir nos repas.

    Oubliez donc cette épître
    Aussitôt son air chanté :
    Rangez-la dans vos pupitres
    Et buvez à ma santé.

  2. Taverne forestière
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    J’entends deux clients qui dissertent,
    Un troisième en silence boit ;
    La taverne au milieu des bois
    Baigne dans leur lumière verte.

    La table est de lin blanc couverte,
    D’un oiseau résonne la voix ;
    Je lis des rimes d’autrefois
    Tout récemment redécouvertes.

    L’endroit n’est certes pas maudit,
    Qui nous tient lieu de paradis
    Où nos âmes sont assouvies.

    C’est pour notre nef un bon port,
    Qui aux vents n’est plus asservie ;
    C’est la source du réconfort.

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