Poème 'Épitaphe d’Arnauld' de Nicolas BOILEAU dans 'Poésies diverses'

Épitaphe d’Arnauld

Nicolas BOILEAU
Recueil : "Poésies diverses"

Au pied de cet autel de structure grossière
Gît sans pompe, enfermé dans une vile bière,
Le plus savant mortel qui jamais ait écrit ;
Arnauld, qui, sur la grâce instruit par Jésus-Christ,
Combattant pour l’Église, a, dans l’Église même,
Souffert plus d’un outrage et plus d’un anathème.
Plein du feu qu’en son cœur souffla l’Esprit divin,
Il terrassa Pélage, il foudroya Calvin ;
De tous les faux docteurs confondit la morale ;
Mais, pour fruit de son zèle, on l’a vu rebuté,
En cent lieux opprimé par leur noire cabale ;
Errant, pauvre, banni, proscrit, persécuté ;
Et même par sa mort leur fureur mal éteinte
N’aurait jamais laissé ses cendres en repos,
Si Dieu lui-même ici de son ouaille sainte
À ces loups dévorants n’avait caché les os.

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