Poème 'Amoureux de la poussière' de leutcha

Ma terre était une belle vallée
les merveilleuses créatures en chair et en os
les hiboux les perroquets les vautours
les pigeons les faucons et les aigles
les crocodiles les singes les éléphants
les léopards les chevaux les moutons et les lions
chacun avait un beau parterre
pour ses jours et pour ses nuits
un sacré matin un vent ennemi
au nom du ventre ou de la couleur
ma terre alluma le flambeau
d’une terre de frictions et de mauvais levains
et dès lors
toute idée de justice
pleure aux pieds de ses belles lumières
et c’est depuis cette lointaine époque
que les habitants de ma pauvre terre
roulent fièrement dans la gadoue
les plus beaux de leurs visions
à présent
ils sont les aigles tout-puissants
d’un idéal au goût de fiel
tout leur art pour élever leur âme
se noie dans la belle sagesse
de nos brumeuses philosophies
leur verbe sans élixir ni médecin
une rapière est incisant le Bien
et leur destin toujours chante ou pleure
le beau temps des époques antérieures
leurs offrandes d’hier et d’aujourd’hui
ont toujours été des insultes
au sanctuaire du seul vrai Dieu
et toute leur vie sous le soleil
est un éternel bras de fer
riche en haines et en coulées de sang
Seigneur aie pitié
de ces amoureux de la poussière
qui le feu préfèrent à tes divins azurs