Poème 'Châteaux en Espagne' de Émile NELLIGAN dans 'Émile Nelligan et son œuvre - Amours d'élite'

Châteaux en Espagne

Émile NELLIGAN
Recueil : "Émile Nelligan et son œuvre - Amours d'élite"

Je rêve de marcher comme en conquistador,
Haussant mon labarum triomphal de victoire,
Plein de fierté farouche et de valeur notoire,
Vers des assauts de ville aux tours de bronze et d’or.

Comme un royal oiseau, vautour, aigle ou condor,
Je rêve de planer au divin territoire,
De brûler au soleil mes deux ailes de gloire
À vouloir dérober le céleste Trésor.

Je ne suis hospodar, ni grand oiseau de proie;
À peine si je puis dans mon cœur qui guerroie
Soutenir le combat des vieux Anges impurs ;

Et mes rêves altiers fondent comme des cierges
Devant cette Ilion éternelle aux cent murs,
La ville de l’Amour imprenable des Vierges !

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Commentaires

  1. Bergère et soldat
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    La belle au capitaine a donné l'anneau d'or ;
    Qu'il est fier, l'officier, d'une telle victoire !
    Le soldat lui en veut ; or (la chose est notoire),
    C'est au sabre qu'on tranche un pareil désaccord.

    Le soldat, contemplant son capitaine mort,
    Comprend que son action n'a rien de méritoire :
    Qu'on fasse une chanson de cette brève histoire,
    Cela n'adoucit point la rigueur de son sort.

    La bergère à ces deux désirs était en proie ;
    Désirs d'hommes dont l'âme et le sabre guerroie,
    Le métier de soldat, certains jours, est impur.

    Pour le fier capitaine, à l'église, un grand cierge ;
    Pour l'amant fusillé, le dos contre le mur,
    Un pleur au coin de l'oeil de l'innocente vierge.

  2. Encore un château en Espagne
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    Hautes en sont les tours, légère en est la pierre,
    Imposante l’entrée que gardent des griffons ;
    C’est un château volant, mais qui s’orne de lierre
    Et d’autres végétaux issus du ciel profond.

    Aux tuiles de couleur qui captent la lumière,
    De surprenants reflets se font et se défont ;
    Mais aussi, par les temps de brume et de poussière,
    Le tout prend la couleur de la neige qui fond.

    Le seigneur se consume en douces rêveries,
    En songe il croit revoir ses copains de tripot.
    Le château, cependant, survole une prairie ;

    Un berger le contemple, ainsi que son troupeau,
    Intrigué de le voir qui dérive sans cesse
    Avec ce vieux baron, sans la moindre princesse.

  3. Dragon des confins
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    C’est un cracheur de feu, c’est un mangeur de pierres,
    Il est fier d’être fils de guivre et de griffon ;
    Il arbore à Noël sa couronne de lierre,
    Il écoute, pensif, les mots de son bouffon.

    Parcourant les bouquins des chercheurs de lumière,
    Il admire l’esprit de ces penseurs profonds ;
    Sa muse à les aimer toujours fut la première,
    Leurs paroles de paix son âme satisfont.

    Les amis du dragon, frères en beuverie,
    Parfois ont transformé sa demeure en tripot,
    Ayant pour taverniers les elfes des prairies.

    Au donjon du manoir flotte un large drapeau,
    Lequel fut dessiné par une enchanteresse
    Et donne fière allure à cette forteresse.

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Émile NELLIGAN

Portait de Émile NELLIGAN

Émile Nelligan (24 décembre 1879 à Montréal – 18 novembre 1941 à Montréal) est un poète canadien (québécois). Disciple du symbolisme, il a été profondément influencé par Octave Crémazie, Louis Fréchette, Charles Baudelaire, Paul Verlaine, Arthur Rimbaud, Georges Rodenbach, Maurice Rollinat et Edgar Allan Poe. Parmi les... [Lire la suite]

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