Poème 'Le Cœur de l’eau' de Georges RODENBACH dans 'Le Règne du silence'

Le Cœur de l’eau

Georges RODENBACH
Recueil : "Le Règne du silence"

I

Être le psychologue et l’ausculteur de l’eau,
Étudier ce cœur de l’eau si transitoire,
Ce cœur de l’eau souvent malade et sans mémoire.
L’eau si pâle ! On dirait une sœur du bouleau
Par le fard du couchant à peine un peu rosée ;
Mais, dormante, elle rêve à d’orageuses mers,
Et, somnolente, elle est la grande névrosée
En qui se plaint sans cesse un écheveau de nerfs,
Fils cachés, fils souffrants ramifiés en elle
Et qui parfois en des frissons, en des remous
Crispent sa nudité d’une douleur charnelle !

Mais le mal est au cœur qui s’afflige dessous,
Cœur impressionnable et sous trop d’influences
Puisque le ciel, jusqu’aux plus minimes nuances,
Rêve d’y transvaser son infini changeant.
À peine d’elle-même et de son cœur qui dure
Quelques endimanchés nénuphars émergeant
Comme son propre songe en un peu de verdure…
Maladif cœur de l’eau qui ne s’appartient pas !
Mais si soumise au ciel, si faible l’eau soit-elle,
Elle cache sa peine en de muets combats,
Sachet inviolé dans des plis de dentelle !
Pourtant on la devine en proie à l’idéal
Et qu’elle a les langueurs, sous ses ondes mobiles,
Des filles de treize ans qui deviennent nubiles.
Et l’on dirait aussi que, parmi l’eau, le mal
Mystérieux d’une puberté s’élabore :
Troubles, frissons, pâleurs, émoi d’on ne sait quoi,
Quand chaque nénuphar comme un sein vient d’éclore,
Sein nouveau-né, doux gonflement qui se tient coi !
Ah ! Ce cœur de l’eau vaste en qui tout s’amalgame,

Ce cœur de l’eau plus compliqué qu’un cœur de femme,
Il faudrait pourtant bien un peu l’analyser.
Oui ! Mais l’eau ne veut pas que quelqu’un la révèle,
Et brusquement tous les décors sombrent en elle
Dans un grand coup de vent, troublant comme un baiser !
Et la voilà, pour que rien d’elle ne s’avère,
Qui s’est enfuie au fond de sa maison de verre.

II

Le rêve de l’eau pâle est un cristal uni
Où vivent les reflets immédiats des choses :
Rideaux d’arbres, pignons, mâts des vaisseaux, ciels roses
Auxquels l’eau calme mêle une part d’infini,
Car leur mirage en elle est sans fin et s’allonge
En une profondeur presque d’éternité…
Les choses ont ainsi leurs minutes de songe
Où chacune, dans l’eau, se semble avoir été
Et s’aperçoit déjà vague et transfigurée ;
Car tout en y prenant conscience de soi
Les choses dans l’eau vaste échappent à leur loi
Et plongent un moment dans un ciel sans durée…

C’est ainsi que l’eau frêle a vécu d’irréel !
Certes brièvement s’y réfléchit le ciel ;
Mais, si peu que ce soit, elle possède une âme
Où l’unité divine apparaît par instants ;
Qu’importent les reflets encore intermittents,
Puisqu’ils y sont mêlés en une seule trame
Et que dans l’eau déjà sont réconciliés
Des nuages, des tours et de longs peupliers.

III

L’eau vivante vraiment et vraiment féminine
Aime le ciel, comme en un hymen consenti,
Reflétant ses couleurs-et sans nul démenti !
Car, pour lui correspondre en tout, elle élimine
Les choses qui pourraient mitiger son reflet,
Et soi-même s’oblige à rester incolore.
Quel émoi douloureux si le vent éraflait
Ce cristal où le ciel lointain trouve à s’enclore,
Infidèle miroir désormais nul et nu !
Il est des jours dans cet amour tout ingénu,
Dans cet amour du ciel et de l’eau, des jours tristes
Où le ciel gris dans l’eau se retrouve si peu ;
Puis d’autres où l’eau gaie absorbe tout son bleu,
Bleu de mois de Marie et de congréganistes,
Mais c’est le soir surtout que devient mutuel
Leur amour, à l’heure où l’eau pâmée et ravie
Brûle des mêmes feux d’étoiles que le ciel !

Lors plus rien n’est dans eux qui les diversifie.
Ressemblance ! Miracle inouï de l’amour
Où chacun est soi-même et l’autre tour à tour…
Or, dans l’assomption de la lune opportune,
— Comme l’amour de deux amants silencieux,
Pour se prouver, se réciproque dans leurs yeux, —
On voit le ciel et l’eau se renvoyer la lune !

IV

L’eau froide se compose une allure factice
De soumission calme aux tours, au vent, au soir ;
Mais elle cache en elle un vouloir subreptice
Et le cœur de son cœur est hermétique et noir.
À peine, en son dédain, garde-t-elle la trace
Des lourds chalands qui l’ont remuée un moment ;
Et le visage humain demeure à la surface
S’il cherche à s’incruster dans ce miroir qui ment,
Miroir au tain bougeant qui s’éraille et dégèle.
À plus forte raison le passage d’une aile !

Et, quant aux arbres vains, dont c’est l’orgueil aussi
D’être répercutés dans l’eau qui les fait vastes,
Vite ils voient dépérir leur mirage transi.
Même le clair de lune et les étoiles chastes,
Encore que l’eau fière et triste soit leur sœur,
Ne vont pas plus avant dans cette eau qui les porte,
— Malgré leur insistance et leur air de douceur, —
Que ne va la lueur dans les yeux d’une morte !
C’est que le cœur de l’eau, si résigné soit-il
A tout ce que la vie impérieuse inflige
Et le contraint à réfléchir dans son eau lige,
Ne garde des objets qu’un reflet volatil,
Et se conserve intact comme un cœur de poète.
Asile impénétrable où rien n’est descendu
Des choses d’alentour dont le mirage est dû,
Mais où l’éternité du ciel seul se reflète.

V

Dans le cadre précis du bassin d’eau dormante
Où gît l’eau nostalgique et qu’un regret tourmente,
Tout est gris-doux comme la fin d’un demi-deuil.
L’eau se dilate ; elle a des transparences d’œil,
Œil bénin, œil de femme où tout un ciel se rêve,
— Oh ! L’émoi de descendre en cet iris profond
Et dans cette prunelle où les nuages vont ! —
Mais l’ivresse de s’y rêver divin est brève
Car on se heurte vite aux si courtes parois,
Quand le cristal se brise en brusques désarrois
Et qu’un gouffre mortel, quoique exigu, succède
À tout cet infini qu’on supposait dans l’eau !

Mensonge équivalent d’un œil cher, d’un œil beau
Qu’on voudrait habiter comme une source tiède
Où l’azur sans limite irait à l’infini.
Mais le voyage aussi dans cet œil n’est qu’un leurre,
Car derrière l’iris au cristal aplani
L’amour naïf, qui plonge au fond, soudain s’épeure,
Se heurte et se fait mal à la froideur du cœur,
Dont le néant si proche est une vasque étroite.
Et dire qu’on rêvait tout un ciel en langueur
Et pour s’y dorlotter des nuages de ouate.

VI

La voix de l’eau qui passe est triste et mire en elle
La moindre affliction qui l’a frôlée un peu ;
Et qui, s’y résorbant, y renaît éternelle
Mais en sourdine et comme en filaments d’adieu.
C’est d’abord la douleur des grands saules lunaires,
Écheveaux en folie où sont brouillés les fils ;
Puis c’est le songe aigri des clochers centenaires
Reflétant jusqu’au fond leurs nocturnes profils.
Or, ces clochers mirés y laissèrent leurs cloches ;
Et c’est pourquoi la voix de l’eau garde toujours
L’air des cloches qui s’y survivent et des tours.
Mais l’eau s’imprègne aussi du bruit des orgues proches,

Qui se traînent sur les grand’routes d’où l’on sent
Leurs plaintes, qui sont des plaintes d’oiseaux en sang,
S’égoutter et se fondre en l’eau qui les délaye
Sa voix est triste encor d’un spleen plus volatil.
La voilà s’affligeant du départ en exil
De la fumée, au loin, que la bise balaie,
Et qui, violentée, abandonne dans l’air
Ses voiles, et dans l’eau vient mourir toute nue…
Que de choses enfin, brèves comme un éclair,
Que la voix de l’eau mire et qu’elle continue,
Survivance de tant de reflets dans sa voix !
Voix qui prolonge un peu les voix qui se sont tues,
Voix triste qu’on dirait posthume et d’autrefois,
Voix qui parle comme regardent les statues.

VII

Le cœur de l’eau pensive est un cœur nostalgique,
Cœur de vierge exaltée en proie à l’idéal,
Qui souffre d’être seule, et qu’aucun ne complique
D’un peu de bruit ce grand calme qui lui fait mal ;
Cœur de l’eau sans tristesse et cependant nocturne,
Cœur de l’eau variable et toujours ignoré,
Qu’un clair d’amour sans doute aurait édulcoré
Et qui s’aigrit, ô cœur à jamais taciturne !
Certes quelques reflets hantent ce cœur de l’eau ;
Mais toute chose en y descendant se déflore,
Toute chose recule et devient incolore,
Y propageant un froid d’absence et de tombeau
Et comme une douleur d’adieux qui diminue…
L’eau n’en est que plus triste, attendant, l’air songeur,
Quelqu’un qui ne vient pas par la pâle avenue
Que les arbres mirés enfoncent dans son cœur.
Hélas ! L’eau solitaire et fantasque frissonne,
Elle qu’on n’aime pas et qui n’aime personne,
Et qui meurt d’être seule en cette fin du jour,
Surtout que des amants vont devisant d’amour
Et sur ses bords, dans elle, effeuillent des paroles :
Bouquet d’aveux que son silence a recueilli,
Propos finals, lis morts des volontés trop molles,
Ô pénultièmes fleurs d’un cœur presque cueilli !
Or ces aveux que l’eau fiévreuse s’assimile
Lui donnent un émoi, toute une anxiété
Comme si devenue elle-même nubile
C’était enfin la fin de sa virginité !

VIII

Les jets d’eau, tout le jour, disent des élégies ;
C’est la forme la moins consolable de l’eau,
Car elle porte haut dans l’air ses nostalgies,
Montant et retombant sous son propre fardeau…
Tristesse des jets d’eau qui sont de l’eau brandie ;
Mais nul n’entend leur mal et rien n’y remédie,
Jets d’eau toujours en peine, impatients du ciel !
Las ! L’azur défia leur sveltesse de lance,
Symbole édifiant d’une âme qui s’élance
Et pulvérise au vent son sanglot éternel.

Car l’essor des jets d’eau défaille en cascatelles
Et leur cœur est aussi comme d’un exilé,
Cœur caché qu’on entend pleurer dans des dentelles.
Or, le moindre mirage est tout annihilé
Dans les vasques en fièvre à la moire élargie.
Pour vouloir trop de ciel, elles perdent le leur !
Mais lorsque la nuit vient, brouillant toute couleur,
Lorsque paraît la lune à la pâle effigie,
Les jets d’eau vont reprendre espoir en sa pitié ;
Et les voilà, frissons de plumes hésitantes,
Qui font monter à coups d’ailes intermittentes
Leurs colombes, en un essor multiplié !
Le ciel lointain a des infinis de lagune…
Détresse des jets d’eau qui n’auront pas été
Conduire leurs ramiers becqueter la clarté
Et goûter le divin aux lèvres de la lune !

IX

Tel canal solitaire, ayant bien renoncé,
Qui rêve au long d’un quai, dans une ville morte,
Où le vent faible à son isolement n’apporte
Qu’un bruit de girouette en son cristal foncé,
S’exalte d’être seul, ô bonne solitude !
Isolement par quoi son cœur devient meilleur
Quand l’eau s’est peu à peu déprise et se dénude
De tout désir qui lui serait une douleur !
Quiétude où jamais ne descend et ricoche
Que le tintement frêle et doux de quelque cloche,
Frissons contagieux d’un bruit presque divin !
Doux canal monacal pour qui le monde est vain ;

Et qui, plein de mirage, est comme un ciel en marche,
Tout nostalgique en des recherches d’infini !
Qu’importe ! Il vit déjà d’éternité. Car ni
Les quais de pierre stricts, ni tel vieux pont d’une arche
N’empêchent la descente en lui du firmament ;
Ou la fumée éparse, au doux renoncement,
De le suivre dans l’air en chemin parallèle ;
Ou les cygnes royaux sur ses bords d’ouvrir l’aile,
Graduel déploiement d’un plumage inégal
Qui mire dans l’eau plane un arpège de plumes !
Ainsi le long du quai rêve le vieux canal
Où les choses se font l’effet d’être posthumes
Parmi cet au delà de silence et d’oubli…
Mais tout revit quand même en son calme sans pli.
Or s’il reflète ainsi la fumée et les cloches
C’est pour s’être guéri de l’inutile émoi ;
Aussi le canal dit : « Ah ! Vivez comme moi !… »
Et son eau pacifique est pleine de reproches.

X

Les pièces d’eau, songeant dans les parcs taciturnes,
Dans les grands parcs muets semés de boulingrins,
S’aigrissent ; et n’ont plus pour tromper leurs chagrins
Qu’un décalque de ciel avant les deuils nocturnes ;
Une fête galante en nuages mirés,
En nuages vêtus de satin soufre et rose
Qui s’avancent noués de rubans et parés
Pour quelque menuet ou quelque apothéose :
Nuages du couchant en souples falbalas ;
Atours bouffants, paniers sur des hanches aiguës,
Tout se mire parmi les vasques exiguës ;
Et le siècle défunt revit dans le cœur las,
Dans le cœur las de l’eau qui soudain se colore
Et croit revoir de belles dames sur ses bords
Le cœur de l’eau des pièces d’eau se remémore,
Lui qui songeait : « Ah ! Qu’il est loin le temps d’alors,
Le joli temps des fins corsages à ramages ! »
Or ce temps recommence et l’eau revoit encor
Mais pour un court instant, l’ancien et cher décor,
Souvenir qui repasse au hasard des nuages…
Car c’est tout simplement cela, le souvenir :
Un mirage éphémère-une pitié des choses
Qui dans notre âme vide ont l’air de revenir ;
Tel, dans les pièces d’eau, le ciel en robes roses !

XI

L’eau, pour qui souffre, est une sœur de charité
Que n’a pu satisfaire aucune joie humaine
Et qui se cache, douce et le sourire amène,
Sous une guimpe et sous un froc d’obscurité ;
Son amour du repos, son dégoût de la vie
Sont si contagieux que plus d’un l’a suivie
Dans la chapelle d’ombre, au fond pieux des eaux,
Où, tranquille, elle chante au pied des longs roseaux
Dont l’orgue aux verts tuyaux l’accompagne en sourdine.
Elle chante ! Elle dit : « Les doux abris que j’ai
Pour ceux de qui le cœur est trop découragé… »

Ah ! La molle attirance et quelle voix divine !
Car, pour leur fièvre, c’est la fraîcheur d’un bon lit !
Et beaucoup, aimantés par cet appel propice,
Perclus, entrent dans l’eau comme on entre à l’hospice,
Puis meurent. L’eau les lave et les ensevelit
Dans ses courants aussi frais que de fines toiles ;
Et c’est enfin vraiment pour eux la bonne mort.
Ce pendant que, le soir, autour du corps qui dort,
L’eau noire allume un grand catafalque d’étoiles.

XII

Le long des quais, sous la plaintive mélopée
Des cloches, l’eau déserte est tout inoccupée
Et s’en va sous les ponts, silencieusement,
Pleurant sa peine et son immobile tourment,
Se plaindre de la vie éparse qui l’afflige !
Et la lune a beau choir comme une fleur sans tige
Dans le courant, elle a l’air d’être morte, et rien
Ne fait plus frissonner au souffle aérien
Ce pâle tournesol de lumière figée.
Eau dédaigneuse ! Sœur de mon âme affligée,
Qui se refuse aux vains décalques d’alentour,
Elle qui peut pourtant mirer toute une tour…

Ô taciturne cœur ! Cœur fermé de l’eau noire,
Toute à se souvenir en sa vaste mémoire
D’un ancien temps vécu qui maintenant est mort :
Cadavre qu’elle lave avec son eau qui tord
Des tristesses de linge en pitié quotidienne…
Ô l’eau, sœur de mon âme, empire des noyés,
Se répétant le soir l’une à l’autre : « Voyez
S’il est une douleur comparable à la mienne ! »

XIII

L’eau triste des canaux s’est désaccoutumée
De refléter le noir passage des vaisseaux
Quand l’hiver l’a figée et l’a comme étamée ;
Mais parfois, certains jours, le dur sommeil des eaux
Sans mirages en lui de la vie en allée,
S’évapore ; on dirait un recommencement
Et que l’eau, d’un air vague, encore un peu dormant,
Sort comme d’une alcôve aux rideaux de gelée.
Ô nudité de l’eau dans le réveil de soi !
Reprise des devoirs de la vie affligeante !

Fuite du clair sommeil et des rêves ! émoi
De l’eau qui se déclôt et qui se désargente !
Or ce désordre blanc qui jonche les bassins,
Ces glaçons bousculés comme des traversins,
N’est-ce pas tout l’ennui, le désarroi précoce
D’un lit défait où pleure un lendemain de noce ? …

XIV

L’eau triste, certains soirs, demande qu’on la plaigne
À cause de la lune y mirant sa pâleur…
Les roseaux sont, autour, des glaives de douleur,
Des glaives de douleur dans la lune qui saigne ;
Car la lune est le cœur, le sacré-cœur de l’eau,
Emmaillotant sa plaie aux linges du halo.

XV

C’est un aquarium qui montre à nu, le mieux,
Dans son eau compliquée, entre des murs de verre,
Le cœur de l’eau, scruté par l’angoisse des yeux.
Là, vraiment net et sûr, le cœur de l’eau s’avère !
Or, dans ce trouble glauque, on trouve un peu de soi,
Un peu du cœur humain qui se tient clos et coi,
Impénétrable cœur plein de choses confuses
Qui dans des murs de verre aussi semblent recluses,
Ô cœur mystérieux comme un aquarium !

Rêves en léthargie, embryons de pensées
Trempant dans une eau morte, aux pâleurs nuancées,
Qui se peuple comme un beau songe d’opium :
Écailles reluisant, nageoires remuées,
Mais dont l’élan se brise aux si courtes parois ;
Désirs s’évertuant sur des minéraux froids ;
Fourmillement visqueux de formes engluées
Et d’espoirs indécis, souffrant d’être captifs,
Qui se crispent dans les varechs aux mailles noires.
L’eau glauque se dilate en d’argentines moires
Quand s’agite un des mille êtres végétatifs ;
Remuement éternel dans cette eau nonchalante
Que la maligne ardeur des bêtes violente,
— Ombres aux contours nets qui viennent, puis s’en vont…
Aquarium du cœur, menteuse somnolence
Que tant de cauteleux mauvais désirs défont.

Ah ! Comment devenir un bassin de silence
Et comment devenir, par quel renoncement,
Un aquarium nu, vidé de son tourment :

Verre où les poissons noirs ont cessé leurs passages,
Âme sans passions, cristal sans tatouages ;
Aquarium du cœur redevenu nouveau
N’ayant plus que la claire innocence de l’eau.

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Georges RODENBACH

Portait de Georges RODENBACH

Georges Rodenbach (né le 16 juillet 1855 à Tournai et mort le 25 décembre 1898 à Paris) était un poète symboliste et un romancier belge de la fin du XIXe siècle. Issu d’une famille bourgeoise d’origine allemande – son père, fonctionnaire au ministère de l’Intérieur, est vérificateur des poids et mesures ;... [Lire la suite]

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