Poème 'Le français (pour nos amis québécois)' de Bernard DIMEY dans 'Le milieu de la nuit'

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Le français (pour nos amis québécois)

Bernard DIMEY
Recueil : "Le milieu de la nuit"

Moi qui vis à Paris depuis plus de vingt ans,
Qui suis né quelque part au coeur de la Champagne,
Jusqu’à ces temps derniers je m’estimais content,
Mais tout est bien fini, la panique me gagne.

Quand je lève mes yeux sur les murs de ma ville,
Moi qui n’ai jamais su plus de trois mots d’anglais,
Je dois parler par gestes… et c’est bien difficile…
Alors je viens chez vous retrouver le français.

Mes amis pour un rien se font faire des check-up,
Moi je me porte bien, j’en rigole de confiance,
J’écoute des longs playings le soir sur mon pick-up ;
Des rockmen, des crooners, y en a pas mal en France.

Et j’bouffe des mixed-up grills, des pommes chips à gogo,
Alors que j’aim’rais tant manger des pommes de terre
Avec des p’tits bouts d’foie et des p’tits bouts d’gigot,
Mais pour ça c’est fini, il faudra bien s’y faire.

On boit des lemon dry dans les snack-bars du coin,
En plein coeur de Paris ça me fait mal au ventre,
Et l’odeur des hot-dogs j’la sens v’nir de si loin
Que mon coeur se soulève aussitôt que j’y rentre.

Et l’on fait du footing, du shopping, des plannings,
De quoi décourager mêm’ la reine d’Angleterre.
Ma femme la s’main’ dernière s’est fait faire un lifting,
J’ai fait du happening pour passer ma colère.

Mais ça peut plus durer, j’peux plus vivre comm’ ça,
J’aime le vieux langage que parlaient mes ancêtres.
Je vous jure que chez nous il s’en va pas à pas
Tant pis pour nos enfants, ils s’y feront peut-être,

Mais moi je n’m’y fais pas, alors j’ai pris l’avion,
J’ai salué Paris du haut de ma nacelle,
Je suis venu chez vous chercher avec passion
Au bord du Saint-Laurent ma langue maternelle.

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Commentaires

  1. Une langue véhicule une culture , et l'enrichir de mots venus d'ailleurs , qui n'ont pas leur équivalence , c'est , à la fois l'enrichir, ainsi que sa culture .
    Mais se laisser submerger, par manque de vigilance ou, et surtout , par snobisme , de mots qui n'ont pas lieu d'être , ( pourquoi dire " best of " au lieu de " florilège ", ou " en live" plutôt que " en direct ".... ! ) , c'est , insidieusement , perdre sa langue et , donc son identité .
    Et ce qui était vrai quand Dimey a écrit ce poème, dans les années 70 , l'est bien davantage aujourd'hui .
    Du 18 ème siècle jusqu'au début du 20 ème , la langue internationale de la diplomatie était le français ,dont la richesse permet toutes les "subtilités" . L'allemand , surtout ,et l'anglais, étaient le langage de la guerre , du conflit .
    Faut-il voir une corrélation avec le fait qu'il n'y a jamais eu autant de conflits , d’agressivité , de par le monde ?
    Tout cela ne pouvait que trouver un écho chez Dimey , ce doux rêveur , pourtant étonnamment lucide !
    Quant à mes favoris , TOUT Dimey y figure en bonne place !!!

  2. Le problème, c'est que la langue anglaise n'existe pas, en Angleterre, la langue officielle est le français. L'anglais est du vieux français à plus de 60%, celui que parlait Jeanne d'Arc, François Villon, Charles VI, Charles VII, Louis XI.
    Il y a 51 pays dans le monde qui parle français, avant que le français s'éteigne, il passera beaucoup d'eau sous les ponts.
    Oui, le mot guerre est un mot germain, mais remember est un vieux mot français. Mais escalier est un mot italien.
    Il y a aussi entre mille et deux mille mots celte dans notre langue, comme dans la langue anglaise : blood qui veut dire le sang, est un mot celte.
    Mon nom de famille lui-même est deux anciens mots celtes germain, francisé, voulant dire : puissance et gouverne ou roi et gouverne, descendant de Charlemagne.
    C'est la méconnaissance du vieux français que Bernard Dimey s'insurge...

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