Poème 'Le lierre et le thym' de Jean-Pierre Claris de FLORIAN dans 'Fables'

Le lierre et le thym

Jean-Pierre Claris de FLORIAN
Recueil : "Fables"

Que je te plains, petite plante !
Disait un jour le lierre au thym :
Toujours ramper, c’est ton destin ;
Ta tige chétive et tremblante
Sort à peine de terre, et la mienne dans l’air,
Unie au chêne altier que chérit Jupiter,
S’élance avec lui dans la nue.
Il est vrai, dit le thym, ta hauteur m’est connue ;
Je ne puis sur ce point disputer avec toi :
Mais je me soutiens par moi-même ;
Et, sans cet arbre, appui de ta faiblesse extrême,
Tu ramperais plus bas que moi.

Traducteurs, éditeurs, faiseurs de commentaires,
Qui nous parlez toujours de grec ou de latin
Dans vos discours préliminaires,
Retenez ce que dit le thym.

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Commentaires

  1. Poules indulgentes
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    Nous aimons les trésors que Maître Coq nous donne,
    Le lierre prélevé sur les murs d'alentour,
    Le thym qu'on voit fleurir à l'ombre de la tour,
    Les plantes inconnues dont elle s'environne.

    Car le gallinacé que sa crête couronne
    Est notre compagnon des bons ou mauvais jours ;
    Il sait des cris de guerre, il sait des mots d’amour,
    Il sait le chien qui grogne et le chat qui ronronne.

    Or, celle qui se voit décerner le rameau,
    Elle va l'estimer plus que toute autre chose,
    Elle l'adorera dans son âme d'oiseau.

    Ainsi rêve une poule en basse-cour enclose,
    D'où l'on entend la voix du porc et du taureau ;
    Le fermier, cependant, taille un buisson de roses.

  2. Buisson sans souci
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    Le buisson sans souci à son plaisir s’adonne ;
    Nulle fleur, nul oiseau, nul arbre aux alentours,
    La lune et le soleil l’éclairent tour à tour :
    D’insectes inconnus ses branches s’environnent.

    Ne crois pas qu’au printemps quelques fleurs le couronnent,
    Il n’en produira pas, ni la nuit, ni le jour ;
    Il subsiste sans peine, il se croit sans amour,
    Même si dans son coeur la nostalgie ronronne.

    Si la muse venait en briser un rameau,
    Il goûterait cela, plus que toute autre chose,
    Plus que voir une fleur ou qu’entendre un oiseau.

    Qui sait si dans ce coeur est la sagesse enclose?
    Buisson de presque rien, frêle comme un roseau,
    Qui aurait pu aimer une aubépine éclose.

  3. L’oie des noix
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    L’oie fait tomber des noix, puis elle nous en donne,
    Elle en trouve beaucoup aux arbres d’alentour ;
    Le porc et la belette en mangent tour à tour
    En un ombreux bosquet qui de fleurs s’environne.

    D’abondance de noix ses efforts se couronnent,
    C’est une récoltante active nuit et jour ;
    Le chat d’un oeil gourmand la couve avec amour,
    Dans un rêve de graisse et de viande, il ronronne.

    La cabane de l’oie est ornée de rameaux,
    Et l’intérieur en est pourvu de toutes choses ;
    Le monde est accueillant pour cet aimable oiseau.

    Dans ce petit réduit sont mille noix encloses
    Remplissant à ras bord un panier de roseaux
    Que garde tout le jour une porte bien close.

  4. Lierre sentencieux
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    Dans l’existence, il faut que l’on s’accroche,
    Disait-il quand nos murs il habillait ;
    Et par endroits, même, il s’entortillait
    Et s’incrustait sur la paroi de roche.

    Il instruisait ses frères et ses proches,
    À mieux pousser, toujours il les formait ;
    Il le faisait, sauf quand il s’endormait,
    Ce vert mentor sans peur et sans reproche.

    Prenant l’avis de son cousin le houx,
    Il préparait des messages pour nous ;
    En l’écoutant, les fleurs furent pensives.

    De l’imiter avions-nous le désir ?
    Sur cette terre il est d’autres plaisirs
    Que d’adopter une forme invasive.

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