Poème 'Promontoire' de Arthur RIMBAUD dans 'Illuminations'

Promontoire

Arthur RIMBAUD
Recueil : "Illuminations"

L’aube d’or et la soirée frissonnante trouvent notre brick en large en face de cette villa et de ses dépendances, qui forment un promontoire aussi étendu que l’Épire et le Péloponnèse, ou que la grande île du Japon, ou que l’Arabie ! Des fanums qu’éclaire la rentrée des théories, d’immenses vues de la défense des côtes modernes ; des dunes illustrées de chaudes fleurs et de bacchanales ; de grands canaux de Carthage et des Embankments d’une Venise louche ; de molles éruptions d’Etnas et des crevasses de fleurs et d’eaux des glaciers ; des lavoirs entourés de peupliers d’Allemagne ; des talus de parcs singuliers penchant des têtes d’Arbre du Japon ; les façades circulaires des « Royal » ou des « Grand » de Scarbro’ ou de Brooklyn ; et leurs railways flanquent, creusent, surplombent les dispositions de cet Hôtel, choisies dans l’histoire des plus élégantes et des plus colossales constructions de l’Italie, de l’Amérique et de l’Asie, dont les fenêtres et les terrasses à présent pleines d’éclairages, de boissons et de brises riches, sont ouvertes à l’esprit des voyageurs et des nobles — qui permettent, aux heures du jour, à toutes les tarentelles des côtes, — et même aux ritournelles des vallées illustres de l’art, de décorer merveilleusement les façades du Palais-Promontoire.

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Commentaires

  1. La mer et la falaise
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    La nef a mis le cap sur un fier promontoire,
    La longue galaxie rend plus claire la nuit ;
    Bilitis voit la voile et sa tristesse fuit,
    L’on dit sur les marins d’étonnantes histoires.

    Un capitaine, c’est un séducteur notoire,
    Mais les bons matelots valent autant que lui ;
    Sous la lune rêveuse ou le soleil qui luit,
    Toujours ils fourniront des efforts méritoires.

    Aphrodite ou Kypris exhibe son corps blanc,
    Le capitaine hésite, et ce signal troublant
    Pourrait faire changer son cap et son allure.

    L’équipage au complet se trouve sur le pont,
    L’un d’eux parle à Vénus qui point ne lui répond ;
    L’homme éprouve en son coeur une froide brûlure.

  2. La mer recommencée
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    Nous voici loin des ports et loin des promontoires,
    Sans croiser d’autre nef, ni le jour, ni la nuit ;
    Le vent nous accompagne et l’horizon s’enfuit,
    Le ciel étoilé dit toujours la même histoire.

    La sirène surgit, séductrice notoire,
    L’ondin reste caché prudemment, quant à lui.
    Un vif poisson volant porte un reflet qui luit,
    Je capte avec plaisir cet éclat transitoire.

    Un ange est installé sur un nuage blanc,
    Il dit qu’il nous protège (on sait qu’il fait semblant) ;
    Nous filons vaillamment, mais sans forcer l’allure.

    Notre grand passe-temps, c’est de laver le pont,
    Ou sinon, pour vider la cale, nous pompons
    En braillant des chansons qui à nos pères plurent.

  3. Navigation d’une bouteille
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    En mes flancs je porte l’histoire
    Du naufrage et du naufragé ;
    Car la mer a bien des dangers,
    Tu le sais, la chose est notoire.

    La vie humaine est transitoire,
    Même si tu sais bien nager ;
    Comme matelot s’engager
    Sur une nef, c’est méritoire.

    Mon corps est fait de verre blanc
    Qui au cristal est ressemblant ;
    Je vais, je maintiens mon allure.

    Je n’avale pas les poissons,
    Je n’absorbe aucune boisson ;
    Je ne porte aucune voilure.

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Arthur RIMBAUD

Portait de Arthur RIMBAUD

Arthur Rimbaud (Jean Nicolas Arthur Rimbaud) est un poète français, né le 20 octobre 1854 à Charleville, dans les Ardennes, et mort le 10 novembre 1891 à l’hôpital de la Conception à Marseille. Lycéen brillant et poète précoce, Arthur Rimbaud excelle dans les compositions latines, parmi lesquelles on trouve ses plus... [Lire la suite]

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