Poème 'Aux poètes futurs' de René-François SULLY PRUDHOMME dans 'Les vaines tendresses'

Aux poètes futurs

René-François SULLY PRUDHOMME
Recueil : "Les vaines tendresses"

Poètes à venir, qui saurez tant de choses,
Et les direz sans doute en un verbe plus beau,
Portant plus loin que nous un plus large flambeau
Sur les suprêmes fins et les premières causes ;

Quand vos vers sacreront des pensers grandioses,
Depuis longtemps déjà nous serons au tombeau ;
Rien ne vivra de nous qu’un terne et froid lambeau
De notre oeuvre enfouie avec nos lèvres closes.

Songez que nous chantions les fleurs et les amours
Dans un âge plein d’ombre, au mortel bruit des armes,
Pour des coeurs anxieux que ce bruit rendait sourds ;

Lors plaignez nos chansons, où tremblaient tant d’alarmes,
Vous qui, mieux écoutés, ferez en d’heureux jours
Sur de plus hauts objets des poèmes sans larmes.

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Commentaires

  1. Choses et autres
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    Au rhapsode, il advient de chanter tant de choses !
    Ce qu'il trouve bizarre et ce qu'il trouve beau ;
    Le jardin et la croix, la nuit et le flambeau,
    Les hommes, l'univers, les effets et les causes.

    Il ne s'enferme point dans le ton grandiose.
    Il reste souriant quand il voit un tombeau,
    Traçant de jolis vers sur un petit lambeau
    De papier qu'il conserve en sa poche mal close.

    Il narre froidement la souffrance et l'amour,
    Le chagrin qui le tient, le deuil qui le désarme
    Et l'appel du printemps, auquel il n'est point sourd.

    De le voir tant rimer, compagnon, ne t'alarme :
    C'est ce qui lui permet d'être heureux, chaque jour,
    Même si, par moments, c'est au prix d'une larme.

  2. Insecte d’argent
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    Je suis le compagnon des lilas et des roses,
    Sans être le plus fort, je suis bien le plus beau ;
    De mille êtres ailés je porte le flambeau,
    Car ils m’admirent tous, et défendent ma cause.

    Je n’ai jamais écrit, ni en vers, ni en prose,
    J’aime les textes brefs gravés sur les tombeaux ;
    J’aime entendre la pie, le choucas, le corbeau,
    Eux qui savent lutter contre la sinistrose.

    Quand arrive l’été, je ris, je fais l’amour,
    Je cesse mes travaux, je dépose les armes ;
    Mais cela n’a qu’un temps, c’est un bonheur trop court.

    L’automne, puis l’hiver sont le temps des alarmes ;
    Mes dossiers sont en ordre, il reste peu de jours,
    Aucun humain sur moi ne versera de larmes.

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René-François SULLY PRUDHOMME

Portait de René-François SULLY PRUDHOMME

René Armand François Prudhomme, dit Sully Prudhomme, né à Paris le 16 mars 1839 et mort à Châtenay-Malabry le 6 septembre 1907, est un poète français, premier lauréat du Prix Nobel de littérature en 1901. Fils d’un commerçant, René Armand Prudhomme, qui souhaite devenir ingénieur, fait ses études au lycée Bonaparte,... [Lire la suite]

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