Poème 'J’ai su' de ATOS

J’ai su

ATOS

J’ai cherché partout dans mes peurs, mes doutes, mon silence,
dans ma mémoire, dans chaque souvenir.
J’ai raclé le moindre fond d’histoire,
j’ai erré dans le désordre, dans ma crasse, dans l’amoncèlement des mots,
dans des musiques fortes, dans mes poings, à travers des villes devenues inconnues, dans la sueur, dans des couloirs, des gares, des matins de cauchemars, dans la fumée de nos alcools.
J’ai raclé, léché le moindre signe,
je me suis ensevelie sous des tas de questions,
recouverte de grandes phrases, de mots de marbre et de lettres de roc,
de mots taillés, bon dieu, c’est vrai …pour bien plus grande que moi.
J’ai regardé la nuit en face et j’ai touché de mes doigts
le moindre ruisseau de soleil qui se mettait à couler devant moi,
j’ai embrassé des arbres, mâcher de l’herbe, enfoui mes bras dans la tourbe,
j’ai marché, appelé , traversé, prié, murmuré, hurlé.
J’ai dévoré des mots, appris un peu, et puis beaucoup.
Intensément, avec violence parfois.
J’ai résisté,
j’ai plongé.
Tombée, vautrée, pieds nus et tête genoux.
J’ai traîné mes pattes folles.
J’ai regardé des flammes, des tours, des ponts.
J’ai attendu des heures.
Et les heures sont venues.
J’ai pris des trains,
j’ai pris sur moi, en moi, au delà de moi.
J’ai cru, j’ai maudit, je me suis tue
J’ai reçu les couleurs, parcouru des images,
j’ai entendu la peinture, j’ai vu la musique,
j’ai respirer en détresse dans la forge de l’humain.
J’ai pris corps là où j’espérai y voir un peu en moi même.
J’ai inventé des noms, baptisé des estuaires, longé des fleuves,
creusé des marais, et semé en terre tout ce que je voulais oublié.
Mais j’ai aimé.
Aimer, aimer à m’en rendre folle, folle de joie, de plaisir, de douleur.
Aimer au point de ne plus redouter aucune absence,
aimer au point de m’abstraire du besoin même d’aimer.
C’est ça qui m’a sauvé.
Aimer.
Ne pas lâcher ça.
Désespérée, dégoutée, dégoulinante, abjecte parfois, défigurée, méconnaissable,
mais aimer toujours.
Ça …j’ai su.
J’ai su même à ne plus rien pouvoir dire d’un visage, d’un nom, d’une lettre, d’un regard.
J’ai su dans des allées de cendres.
J’ai su dans la béance, dans l’ignorance.
Aimer. J’ai su.
Et me voilà revenue.

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