Poème 'Le désert' de Charles-Marie LECONTE DE LISLE dans 'Poèmes barbares'

Le désert

Charles-Marie LECONTE DE LISLE
Recueil : "Poèmes barbares"

Quand le Bédouin qui va de l’Horeb en Syrie
Lie au tronc du dattier sa cavale amaigrie,
Et, sous l’ombre poudreuse où sèche le fruit mort,
Dans son rude manteau s’enveloppe et s’endort,
Revoit-il, faisant trêve aux ardentes fatigues,
La lointaine oasis où rougissent les figues,
Et l’étroite vallée où campe sa tribu,
Et la source courante où ses lèvres ont bu,
Et les brebis bêlant, et les boeufs à leurs crèches,
Et les femmes causant près des citernes fraîches,
Ou, sur le sable, en rond, les chameliers assis,
Aux lueurs de la lune écoutant les récits ?
Non, par delà le cours des heures éphémères,
Son âme est en voyage au pays des chimères.
Il rêve qu’Al-Borak, le cheval glorieux,
L’emporte en hennissant dans la hauteur des cieux ;
Il tressaille, et croit voir, par les nuits enflammées,
Les filles de Djennet à ses côtés pâmées.
De leurs cheveux plus noirs que la nuit de l’enfer
Monte un âcre parfum qui lui brûle la chair ;
Il crie, il veut saisir, presser sur sa poitrine,
Entre ses bras tendus, sa vision divine.
Mais sur la dune au loin le chacal a hurlé,
Sa cavale piétine, et son rêve est troublé ;
Plus de Djennet, partout la flamme et le silence,
Et le grand ciel cuivré sur l’étendue immense !

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Commentaires

  1. Ermite-lion
    --------

    J’habite un terroir ignoré des hommes,
    Je peux affirmer que j’en suis heureux ;
    Quant aux animaux qui Seigneur me nomment,
    Je les laisse en paix, c’est tant mieux pour eux.

    Jamais je ne fus très aventureux,
    Je ne cours pas loin, j’aime faire un somme ;
    On croit que jadis je fus amoureux,
    Ce fut quand Virgile écrivait dans Rome.

    Nul ne me verra prier à genoux,
    Je suis mieux couché, soit dit entre nous;
    Bien vivre, pour moi, c’est une évidence.

    Faites votre vie, chers frères humains,
    Espérez toujours de beaux lendemains ;
    Mais je n’entre point dans vos folles danses.

  2. Seigneur dromadaire
    ----------------

    Moi qui domine le désert,
    Je règne sur très peu de monde ;
    Je ne suis pas maître des ondes,
    Je n’ai que peu de jardins verts.

    Cet endroit n’est pas un enfer,
    J’aime l’aspect des dunes blondes ;
    Venant de couches très profondes,
    Un filet d’eau nous est offert.

    Les nuits sont paisibles et fraîches,
    Les saisons toujours un peu sèches ;
    Dans tout cela, rien d’effarant.

    Moi, j’ai vécu des odyssées
    De sagesse et de foi tissées ;
    Dieu me regarde en se marrant.

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Charles-Marie LECONTE DE LISLE

Portait de Charles-Marie LECONTE DE LISLE

Charles Marie René Leconte de Lisle, né le 22 octobre 1818 à Saint-Paul dans l’Île Bourbon et mort le 17 juillet 1894 à Voisins, était un poète français. Leconte de Lisle passa son enfance à l’île Bourbon et en Bretagne. En 1845, il se fixa à Paris. Après quelques velléités lors des événements de 1848, il renonça... [Lire la suite]

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