Poème 'Anton' de ATOS

Anton

ATOS

Anton,
Ne referme pas le livre,
Je t’en prie.
Laisse ce cuir de chagrin
Reposer entre tes mains.

Même si cette ville est en flamme,
Et que les hommes donnent passage aux enfers,
Ne referme pas le livre,
Je t’en supplie.

Et, qu’en cette heure, en cette demeure,
Il reste, encore, un peu de nous.
Que ta voix nous délivre de nos peurs,
Et que nous puissions, debout, accueillir le jour
Comme si nous attendions le retour de l’ami
Dont le visage s’efface déjà dans les cœurs.

Sens-tu, en cette heure,
les pavés saigner de ses terreurs ?
Entends-tu,
Sur les braises de la nuit,
le fleuve emporter
Sous son drap de cendres
les restes putrides de nos gloires ?

Le calme de ces mots, et la douceur de nos gestes
éloigneront peut être,
Anton,
la haine de tous ces chiens.

Nous devons y croire, Anton,
Pour que nous puissions refuser les ténèbres.

Tant que ce livre sera ouvert,
Il restera tout de nous.

Tant que ce livre restera ouvert,
Nous ne renierons rien de ce que nous serons.

Dis moi, Anton,
La beauté du nom de l’homme,
Redis moi ces folies qui bouleversent nos vies,
Murmure moi l’océan et puis le vent.
Rappelle moi l’odeur de la terre, et l’aiguille de givre.
Raconte moi le voyage des bergers,
la course folle des ruisseaux.

Ne referme pas le livre, Anton,
Je t’en supplie.
Garde le entre tes mains,
Jusqu’au matin.

Rappelle nous, Anton,
Tout ce qui fait de nous des hommes.

Ce soir, ta voix est la seule lueur
Qui rayonne sur cette cité qui se meurt.

Les ruines, et notre sang.
Leurs crimes et nos serments.

Alors peut être ,à l’heure où les ombres
S’enfuiront par la plaine,
Pourrons nous entendre les derniers mots d’un vers
qui porteront raison aux battements de nos espoirs.

Ces mots, et notre coeur,
auront alors vaincu les cris et leur fureur.

Même si la ville éventre nos murs de sa haine,
Même si ma force ne peut arrêter le tremblement de nos chairs,
Je t’en prie, Anton,

Ne referme pas le livre.

Tant qu’il restera ouvert entre tes mains,
Il sera écrit que nous resterons des hommes.

Je t’en supplie,
Laisse ce cuir de chagrin,
Reposer entre tes mains,
Il me semble déjà,
Anton,
Que le jour vient.

Extrait du recueil « Ynys Avallach »,
Les éditions du Littéraire – La bibliothèque de Babel
juin 2014 – ISBN-13 : 978-2919318223

« Le ciel se retira comme un livre qu’on roule (Apocalypse, VI, 14). »

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