Poème 'De l’amour des voyages' de ATOS

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De l’amour des voyages

ATOS

De l’instant de nos voyages,
il faudrait vouloir ne rien en dire.
Mais, après les avoir connus,
revenir à l’autre et lui sourire.
Offrir au souvenir l’empreinte de ce que nous y avons laissé.
Et en patience, porter à notre terre les germes de leur promesse.

Tendre partir auquel on se conviait.
Tendre partir dont on ignorait ce que l’on y trouverait.
Aventurier de son unique espace.
Partir seul,
L’âme en proie et le désir en proue.
Partir inopinément,
Partir en inconnu des autres,
En ne s’imposant ni le temps, ni la distance,
Mais uniquement un possible différent.

Partir vers d’autres lieux.
En voyage toujours.
Jamais en fausse résidence.
Sans mauvaise compagnie.
Songer que notre désir
nous précède et galope devant nous.
Qu’il annonce notre venue.
Songer à se rendre en un lieu,
L’imaginer bien avant que de s’y rendre.
Vivre un chemin avant d’en atteindre le but.
A l’instant de ce voyage, longtemps, il faut veiller.
C’est dans cette attente que débute le conte.
Savoir partir pour poursuivre un voyage
comme nous le ferions d’un rêve.
Et puis en poupe,
Penser peut-être à un retour,
Le supposer et le laisser filer.
Il faut connaître ce que l’on quitte
Pour mieux attendre ce qui nous vient.
Penser aux terres connues,
Les oublier un peu,
et les laisser à la patine des enfances.
Ne rien en savoir, mais y songer,
Et ne jamais les ignorer.
Ne pas se poser en un lieu
Mais se soumettre à son transport.

Nous ne savons plus voyager
Nous partons sans doute,
Mais nous n’écrivons plus à notre cœur
Lorsque notre corps est en chemin.
Que savons-nous encore d’une halte ?
De notre souffle, d’une étape ?
À ne plus rien mesurer nous ne savons plus considérer.
Les hommes partent en vacance
et ne désirent qu’y demeurer en assurant leur aisance.
C’est à eux-mêmes qu’ils donnent congés.
La vacance est un état qui trace parfois de sévères frontières.
Les hommes ne savent plus se quitter.
Ils ne se séparent jamais.
Et se reposent parfois en un lieu étranger,
Là, dans quelque lit, ils s’endorment sans histoire et trop vite.
Le voyage sans retour a quitté leur pensée.

C’est dans un regard que l’on sait le voyage qui a construit une âme.
Quelle terre elle a traversée, quel lointain elle a embrassé.
Elle était en un ailleurs qui à présent se vit en elle.
Son récit est toujours singulier.
Devant un mot elle s’arrête soudain,
Là, où coule cette rivière dont elle connaît la source.
On se remet au monde et on découvre sa place.
On voit les boutures rapportées de son périple
Prendre vigueur et hardiesse sauvage.
On goûte le moment d’un autre retour
Et on s’étonne de son inconnue saveur.
C’est au présent, en sa mémoire, qu’il convient d’offrir cet espace.

De l’instant de nos voyages,
ll faudrait vouloir ne rien en dire.
Mais, après les avoir connus,
venir aux autres et leur sourire.
Laisser en souvenir l’empreinte de ce que nous y avons laissé.
Les cernes bleus que dessinent les voyages modèlent chaque visage.
C’est ainsi que se lit l’impression d’incroyables paysages.

Poème associé au tryptique « Port des brochets, lumières de chenal d’entrée de port » de Jacques Kerzanet, peintre de l’école de Bouin, membre fondateur du collectif Lumières de Jade.

Extrait du recueil « Ynys Avallach »,
Les éditions du Littéraire – La bibliothèque de Babel
juin 2014 – ISBN-13 : 978-2919318223

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