Poème 'Pèlerines' de Théodore de BANVILLE dans 'Dans la fournaise'

Pèlerines

Théodore de BANVILLE
Recueil : "Dans la fournaise"

Dans ces mois, où souffle un vent
Énervant,
Les dames, les ballerines
Et les élèves de Got
Et Margot
Arborent des pèlerines.

Sveltes et roses, marchant
Et cachant
Les trésors de vos poitrines,
Où donc fuyez-vous ainsi?
Loin d’ici,
Pèlerines, pèlerines!

Je reconnais ce charmant
Vêtement
Que la mode immortalise,
Long spencer ou court manteau,
C’est Watteau
Qui l’offrit à Cidalise.

Rose ou noir, ou d’un malin
Zinzolin,
Il cachait dans son mystère
Vos malicieux desseins
Et vos seins,
Quand vous partiez pour Cythère.

Votre nef, au jour naissant,
Caressant
La vague respectueuse,
Balançait, près des îlots,
Sur les flots,
Sa coque voluptueuse.

Charmes toujours enviés!
Vous aviez
Mille grâces à revendre.
Vous promettiez vos faveurs
Aux rêveurs
Tircis, Myrtil et Silvandre,

Oh! partir! Suivre au lointain,
Le matin,
La douce brise marine!
Sur des appas délicats
C’est le cas
D’avoir une pèlerine.

Elle ne s’ouvre jamais
Certes, mais,
Jumelle comme une rime,
On sent bien que sous les plis
Assouplis
Se dresse une double cime.

Et ces monts vieux et nouveaux,
Qui sont vos
Certificats de civisme,
J’explique leurs bouts aigus,
Exigus,
Par les lois de l’atavisme.

C’est ainsi qu’aux paradis
Interdits,
En montrait notre mère Ève;
Mais la blanche floraison
En prison
Nous enchante comme un rêve.

Car dans les draps, au léger
Voltiger,
Une cassure est complice,
Pour tourmenter à loisir
Le désir,
Et sous l’étoffe qui plisse,

Le bon régal que d’oser
Supposer
Les lumières purpurines
Et les feux extasiés
Des rosiers
Cachés sous vos pèlerines!

24 juin 1890.

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