Désespérément
À Henry Cazalis.
L’immense ennui, ce fils bâtard de la douleur,
En maître est installé dans mon âme et l’habite,
Et moins que la vieillesse affreuse et décrépite,
Cette âme de trente ans a gardé de chaleur.J’en atteste ces yeux éteints, cette pâleur
Et ce cœur sans amour où plus rien ne palpite ;
Je vois mon avenir et je m’y précipite
Ainsi qu’en un désert qui n’a pas une fleur.Pourtant, vers la saison des brises réchauffées,
La jeunesse parfois me revient par bouffées,
J’aspire un air plus pur, je vois un ciel plus beau.Mais cette illusion ne m’est pas un présage,
Et l’espoir n’est pour moi qu’un oiseau de passage
Qui, pour faire son nid, choisirait un tombeau.
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François COPPÉE
François Édouard Joachim Coppée, né le 26 janvier 1842 à Paris où il est mort le 23 mai 1908, est un poète, dramaturge et romancier français. Coppée fut le poète populaire et sentimental de Paris et de ses faubourgs, des tableaux de rue intimistes du monde des humbles. Poète du souvenir d’une première rencontre... [Lire la suite]
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L’amphore de Diogène
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Acceptant tour à tour la joie et la douleur,
Le sage en un logis plutôt précaire habite ;
Mais sa vieillesse est digne et n’est pas décrépite,
Endurant sans broncher le froid ou la chaleur.
Ce citoyen de Grèce est homme de valeur,
Aussi dans sa poitrine un noble coeur palpite ;
La mort s’en vient vers lui sans qu’il s’y précipite,
Qu’il traite plaisamment de jeune fille en fleur.
Il mange calmement sa soupe réchauffée,
Et sa jeunesse alors lui revient par bouffées ;
Peut-être qu’en ce temps les dieux le trouvaient beau.
Le cynique penseur ne croit pas aux présages,
Mais il lit quelquefois l’amour sur le visage
D’une muse rêveuse, aux abords d’un tombeau.
L’ange Phélabète
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D’Adam j’aurais voulu partager la douleur,
Ou des malheureux qui en inframonde habitent,
Comprendre de Caïn la colère subite,
Éprouver le regret, la peine et le malheur...
Mais je ne suis qu’un ange, un être sans chaleur,
En ma dure poitrine aucun coeur ne palpite ;
Jamais vers une aimée je ne me précipite,
Je ne sais pas vibrer au miracle des fleurs.
Personne n’entendra cette plainte étouffée ;
Je n’ai jamais étreint la muse ni la fée,
Jamais un grand amour ne m’a rendu plus beau.
Je suis un figurant, un bout de paysage,
Nulle fille en secret ne songe à mon visage,
Je n’aurai même pas les honneurs d’un tombeau.
Nécropole angéllique
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Les tombeaux des anges,
On y dépose parfois
Des fleurs d'inframonde.