Poème 'Lettre du Mexique' de Tristan CORBIERE dans 'Les Amours jaunes'

Lettre du Mexique

Tristan CORBIERE
Recueil : "Les Amours jaunes"

La Vera-Cruz, 10 février.

« Vous m’avez confié le petit. – Il est mort.
Et plus d’un camarade avec, pauvre cher être.
L’équipage… y en a plus. Il reviendra peut-être
Quelques-uns de nous. – C’est le sort –

« Rien n’est beau comme ça – Matelot – pour un homme ;
Tout le monde en voudrait à terre – C’est bien sûr.
Sans le désagrément. Rien que ça : Voyez comme
Déjà l’apprentissage est dur.

« Je pleure en marquant ça, moi, vieux Frère-la-côte.
J’aurais donné ma peau joliment sans façon
Pour vous le renvoyer… Moi, ce n’est pas ma faute :
Ce mal-là n’a pas de raison.

« La fièvre est ici comme Mars en carême.
Au cimetière on va toucher sa ration.

Le zouave a nommé ça – Parisien quand-même –
Le jardin d’acclimatation.

« Consolez-vous. Le monde y crève comme mouches.
… J’ai trouvé dans son sac des souvenir de cœur :
Un portrait de fille, et deux petites babouches,
Et : marqué – Cadeau pour ma sœur. –

« Il fait dire à maman : qu’il a fait sa prière.
Au père : qu’il serait mieux mort dans un combat.
Deux anges étaient là sur son heure dernière :
Un matelot. Un vieux soldat. »

Toulon, 24 mai.

Poème préféré des membres

Aucun membre n'a ajouté ce poème parmi ses favoris.

Commentaires

Aucun commentaire

Rédiger un commentaire

© 2024 Un Jour Un Poème - Tous droits réservés
UnJourUnPoeme sur Facebook UnJourUnPoeme sur Twitter RSS