Poème 'L’oeuvre noire' de ATOS

L’oeuvre noire

ATOS

L’haleine des brumes
insuffle, à ce jour, un autre chemin.
La nuit essuie sa bouche du revers de sa fièvre.
Ma palette de suie sèche dans mes mains.

Il fait matin.

Que d’autres le sachent :
En masse noire, ici, j’ai pactisé avec mon âme !
Que le diable s’en souvienne !
Qu’il aille, infâme, pleurer ailleurs son mal.
Je suis seul maître de l’étal.
A présent, la toile se révèle
Et m’extirpe de ses plis.

C’est toi Lumière que j’invoque !
Toi seule que je convoque !

Entre et viens en ce lieu juger de ce pouvoir.
Ma noire est entrée en matière !
C’est à toi maintenant d’y porter ta couleur!
Verse en elle ta blanche obscurité.
Que ton lait jaillisse et qu’il inonde mes traits.

Noire est la face du monde
Noire se voudrait prendre place .
Lisse, luisante, coupante surface.
Noire sur tous les visages guerriers.

C’est sans compter,
Ma force et mes gestes assénés.
C’est sans compter
La chaleur de ton jet.
La main de l’homme travaille,
Elle creuse et enveloppe.
La matière noire appelle la spirale d’un autre monde.
Toi seule pourra nous sauver.
Entre Lumière !
Par les pores de ce spectre
embrase l’évidente crasse de notre cécité.
Jusqu’à moi le jour est venu t’escorter.
Tu entres par les portes de la cité
pour exorciser l’insupportable silence.
Découvre par ta puissance ,
Ce qu’en cette toile, je viens de composer.
Par tes courbes célestes gonfle cette oeuvre.
Soulève les ombres de son voile.
Écaille les nacres de sa nue.
Entaille cette illusion repue.
Le jais cède sous ta glace.
Tends et brise mes lignes.
Tranche en cette vaine ébène.
Je livre ma noire à ce combat.
A la trace, mets toi en chasse
et éclaire ce que je n’attendais pas.
Chante aux hommes ce qu’ils n’entendaient pas.
Passe Lumière
Passe autour, par ,sur et partout en cette noire fidèle.
J’ai brassé tout en elle pour toucher ce que je ne voyais pas.
A toi Lumière,
Semblante distance,
A toi Lumière,
Contraste des cendres.
A toi Lumière
Le parfum des absences.

Joue le désaccord qui se fait entendre !

Avant toi je supposais l’informe.
J’ai dépeint aux non-vus ta venue.
Je t’ai, de si loin,… attendue.
Accroche et ne faiblis pas.
Mets en jour ma matière.
Dis leur, Prêtresse solaire,
Dis leur ce qu’ils ne devinaient pas :
Le relief de notre monde
découvre sa couleur
dans la lumière de ses ombres.

Puisque qu’en ce jour,
Lumière,
Tu me rejoins,
tout, ici, me semble bien.

Paru en septembre 2013 dans la revue recoursaupoeme.fr

Extrait du recueil « Ynys Avallach »,
Les éditions du Littéraire – La bibliothèque de Babel
juin 2014 – ISBN-13 : 978-2919318223

Autoportrait noir d'Eugène Leroy - 1960

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