Poème 'Tour Eiffel' de Théodore de BANVILLE dans 'Sonnailles et Clochettes'

Tour Eiffel

Théodore de BANVILLE
Recueil : "Sonnailles et Clochettes"

Tour Eiffel, grandis, monte encore
Dans la lumière et dans l’aurore,
Dans les éthers silencieux.
Née entre les pieds noirs d’Hécate,
Monte, grande fleur délicate,
Mets ton front dans les sombres cieux.

Car un génie au coeur de flamme
Fouille la terre jusqu’à l’âme
Et jusqu’aux portes de l’enfer,
Et pour préparer à la France
Le nid joyeux de l’espérance,
Le tresse avec des brins de fer.

Oui, sois de plus en plus géante,
Et devant la foule béante
Que charmeront tes fils vermeils,
Apparais, de clarté baignée,
Comme une toile d’araignée
Où vont se prendre les soleils.

Pendant les prochaines semailles,
Luis, resplendis avec tes mailles,
Brille, joyau prestigieux
Et séduis l’oeil par ta caresse,
Filigrane ajouré, que tresse
Un orfèvre prodigieux.

On verra, dans leurs vols énormes,
Accourir vers tes plates-formes
Le hardi faucon, le gerfaut,
Les vautours, les aigles voraces;
Mais en contemplant ces terrasses,
Ils trouveront que c’est trop haut.

Monte encor, Tour démesurée!
Le dieu de la mer azurée
Et de l’ouragan libyen,
Dit à l’équipe ralliée
De Babel réconciliée:
Venez, à présent. Je veux bien.

La Tour grandit et, sur son faîte,
Invincible, dressant la tête,
L’Homme ouvrant tout grands ses yeux clairs,
Pourra, dans ses jeux ordinaires,
Prendre dans ses mains les tonnerres
Et jouer avec les éclairs.

Car, autrefois chaste et jalouse,
Maintenant, la Science épouse
L’Homme et, regardant l’Orient,
Pour lui déchire tous les voiles
Qui lui dérobaient les étoiles,
Et baise sa bouche, en riant.

Sans craindre que rien la meurtrisse,
La Science libératrice,
Dans sa main tenant une faux
Que l’on ne voyait pas naguère,
Moissonnera les deuils, la guerre,
Les canons et les échafauds.

Tour, grand lys fleuri dans l’espace,
Colosse de force et de grâce!
Épouvantant le doute amer,
Les certitudes et l’extase
Reviendront caresser ta base,
Comme les vagues d’une mer.

Et, malgré le vent, qui s’effare,
Ton veilleur, auprès de son phare,
A l’heure divine où le bruit
S’éteint dans la nature fée,
Entendra la Lyre d’Orphée
Guider les astres, dans la nuit.

8 janvier 1889.

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Commentaires

  1. je n'ais pas aprise la poesie comme ça je l'ai couper j'ai pris que certains couplet

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