Poème 'Tueur de monstres' de Théodore de BANVILLE dans 'Les exilés'

Tueur de monstres

Théodore de BANVILLE
Recueil : "Les exilés"

Le beau monstre, à demi couché dans l’ombre noire,
Laissait voir seulement sa poitrine d’ivoire
Et son riant visage et ses cheveux ardents,
Et Thésée, admirant la blancheur de ses dents,
Regardait ses bras luire avec de molles poses,
Et de ses seins aigus fleurir les boutons roses.
Au loin ils entendaient les aboiements des chiens,
Et la charmante voix du monstre disait : Viens,
Car cet antre nous offre une retraite sûre.
Ami, je dénouerai moi-même ta chaussure,
J’étendrai ton manteau sur l’herbe, si tu veux,
Et tu t’endormiras, le front dans mes cheveux,
Sans craindre la clarté d’une étoile importune.
Mais, comme elle parlait, un doux rayon de lune
Parut, et le héros, dans le soir triste et pur,
Vit resplendir avec ses écailles d’azur
Le corps mystérieux du monstre, dont la queue
De dragon vil, pareille à la mer verte et bleue,
Déroulait ses anneaux, et de blancs ossements
Brillèrent à ses pieds, sous les clairs diamants
De la lune. Alors, sourd à la voix charmeresse
Du monstre, et saisissant fortement une tresse
De la crinière d’or qui tombait sur ses yeux,
Il tira son épée avec un cri joyeux,
Et deux fois en frappa le monstre à la poitrine.
Et, hurlant comme un loup dans la forêt divine,
Crispant ses bras, tordant sa queue, horrible à voir,
L’Hydre au visage humain tomba dans son sang noir,
Tandis que le héros sous l’ombrage superbe,
Essuyant son épée humide aux touffes d’herbe,
S’en allait, calme ; et, sans que ce cri l’eût troublé,
Il regardait blanchir le grand ciel étoilé.

16 novembre 1873.

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Commentaires

  1. Dragon de Martignas
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    Ce vieux dragon buvait de la bière saxonne ;
    Il lisait du courrier venant de ses enfants,
    Tous de fiers doctorants, étudiants triomphants,
    Car leur sagesse est grande et leur mémoire est bonne.

    Il a peu d’occasions de les voir en personne ;
    Il peut se rappeler leurs premiers pas tremblants,
    Leurs premiers traits de feu, leurs premiers envols lents,
    Eux qui dans peu de temps recevront sa couronne.

    C’est le temps qui agit, la vie qui s’accomplit,
    Ses trois fils vont régner, ça ne fait pas un pli,
    Qui seront les époux de trois reines charmantes.

    Pourquoi naître dragon ? Serait-ce par hasard
    Si certains sont ainsi, et d’autres sont lézards ?
    As-tu rêvé cela, divinité dormante ?

  2. Monstre de nulle part
    -----------

    Mes deux grands-pères sont Eros et Thanatos
    Et pour marraine j’ai la vieille fée Grenouille ;
    Elle m’ensorcela du bout de sa quenouille,
    Je peux donc imiter le souple ouroboros.

    J’ai voulu courtiser la reine de Lesbos,
    Mais elle a mis à prix ma modeste dépouille ;
    Je ne suis donc pas roi, pourtant, je me débrouille
    Ici je suis connu sous le nom d’Atropos.

    Ma compagne est jolie sans être prolifique,
    Auprès d’elle je perds mon aspect maléfique ;
    J’évite la bagarre et les mots malséants.

    Je bois mon apéro chez les cracheurs de flammes,
    Ils ont une potion qui revigore l’âme
    Et qui fait que mon coeur est celui d’un géant.

  3. Sagesse d’un anoure
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    Il te faut écouter les mots de la grenouille,
    Elle connaît la mort, puis la vie, puis l’amour ;
    Elle en clame le sens à tous les carrefours,
    Pour les honnêtes gens comme pour les fripouilles.

    Elle sait le secret de la Grande Citrouille,
    Ainsi que la chanson de la plus haute tour ;
    La Fontaine autrefois venait suivre ses cours,
    Lui qui dans les secrets des animaux farfouille.

    La grenouille fréquente un moine régulier
    Qui lui offre souvent des livres singuliers ;
    Ensemble ils ont écrit une pantalonnade.

    Elle vit au grand air, le monde est sa maison,
    Mais elle y fait surtout de courtes promenades
    Ne bougeant nullement dans la froide saison.

  4. Autorité batracienne
    ------

    Le Sage approuva
    La grenouille magistrale
    Au sobre discours.

    ============================

    https://paysdepoesie.wordpress.com/2017/04/07/grenouille-magistrale/

  5. c'est beau! c'est du veau ?

  6. Plus énorme qu'un boeuf
    -----

    La sage grenouille
    A dilaté son ego
    D'un facteur dix mille.

  7. Vêture de sinople
    -------

    La fée en rêvant
    Tricote en queues de grenouilles
    Un froc improbable.

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