Autre complainte de l’orgue de barbarie
Prolixe et monocorde,
Le vent dolent des nuits
Rabâche ses ennuis,
Veut se pendre à la corde
Des puits ! et puis ?
Miséricorde !-Voyons, qu’est-ce que je veux ?
Rien. Je suis-t-il malhûreux !Oui, les phares aspergent
Les côtes en sanglots,
Mais les volets sont clos
Aux veilleuses des vierges,
Orgue au galop,
Larmes des cierges !-Après ? Qu’est-ce qu’on y peut ?
-Rien. Je suis-t-il malhûreux !Vous, fidèle madone,
Laissez ! Ai-je assisté,
Moi, votre puberté ?
Ô jours où Dieu tâtonne,
Passants d’été,
Pistes d’automne !-Eh bien ! Aimerais-tu mieux…
-Rien. Je suis-t-il malhûreux !Cultes, Littératures,
Yeux chauds, lointains ou gais,
Infinis au rabais,
Tout train-train, rien qui dure,
Oh ! à jamais
Des créatures !-Ah ! ça qu’est-ce que je veux ?
-Rien. Je suis-t-il malhûreux !Bagnes des pauvres bêtes,
Tarifs d’alléluias,
Mortes aux camélias,
Oh ! Lendemain de fête
Et paria,
Vrai, des planètes !-Enfin ! Quels sont donc tes voeux ?
-Nuls. Je suis-t-il malhûreux !La nuit monte, armistice
Des cités, des labours.
Mais il n’est pas, bon sourd,
En ton digne exercice,
De raison pour
Que tu finisses ?-Bien sûr. C’est ce que je veux.
Ah ! Je suis-t-il malhûreux !
Poème préféré des membres
Aucun membre n'a ajouté ce poème parmi ses favoris.
Jules LAFORGUE
Jules Laforgue, né à Montevideo le 16 août 1860 et mort à Paris le 20 août 1887, est un poète du mouvement décadent français. Né dans une famille qui avait émigré en espérant faire fortune, il est le deuxième de onze enfants. À l’âge de dix ans, il est envoyé en France, dans la ville de Tarbes d’où est originaire... [Lire la suite]
- Cas rédhibitoire (Mariage)
- Dimanches (Les nasillardes cloches)
- Mettons un doigt sur la plaie
- Complainte des débats mélancoliques et...
- Dimanches (Je ne tiens que des mois)
- Litanies des premiers quartiers de la Lune
- On les voit chaque jour
- Complainte à Notre-Dame des Soirs
- Climat, faune, flore de la Lune
- Dimanches (Ils enseignent)
Commentaires
Aucun commentaire
Rédiger un commentaire