Poème 'Memento' de Charles CROS dans 'Le coffret de santal'

Memento

Charles CROS
Recueil : "Le coffret de santal"

A Michel Eudes

Les êtres trépignants, amoureux de l’utile,
Passent le temps fuyard à des combinaisons
D’actions au porteur, de canaux, de maisons
De commerce, où leur sens s’éteint ou se mutile.

D’autres ont ici-bas un but aussi futile,
Fabriquant des tableaux, des vers, des oraisons,
Cela, pour que leur nom, durant quelques saisons,
Près des noms des chevaux vainqueurs au turf, rutile.

Vous avez pris la vie autrement. Vous pensez
Que l’agitation incessante, illusoire,
N’est pas oeuvre de dieu, mais rôle d’infusoire.

A rire en plein soleil croyez bien dépensés
Les lugubres instants d’un monde provisoire,
Et n’enlaidissez pas comme les gens sensés.

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Commentaires

  1. L'homme à ses lendemains ne cesse de penser,
    Cette façon de faire est probablement vaine.
    L'avenir dosera les bonheurs et les peines,
    Mais respecter nos plans, il en est dispensé.

    Comme César disant que les dés sont lancés,
    Je poursuis mon chemin sans savoir où il mène.
    César a dit aussi que l'erreur est humaine
    Quand par ses bons amis son corps fut transpercé.

    Feuille qui sur sa branche à l'automne demeure,
    Est-ce pour quelques jours, est-ce pour quelques heures,
    Le vent venu du Nord n'en sait lui-même rien.

    J'écris mes mots du jour, selon que vient la brise.
    Ma plume est quelquefois la première surprise
    De voir ce que produit son parcours quotidien.

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