Poème 'Paresse' de Albert SAMAIN dans 'Le chariot d'or'

Paresse

Albert SAMAIN
Recueil : "Le chariot d'or"

Debout, voluptueux, dans l’ombre où tu t’endors
Un clairon martial résonne et te convie.
Debout ton coeur, debout ta pensée asservie…
Ne faut-il pas que tu sois fort entre les forts ?

La volonté, lionne à l’indomptable essor,
Sous sa griffe superbe emporte au loin la vie,
Et s’irrite et triomphe et, belle inassouvie,
Rugit à l’avenir sur des dépouilles d’or !

Mais non, c’est la débauche en sa louche taverne,
Qui t’attise à ses yeux brûlés que le plomb cerne,
Et souffle en ricanant ton pur flambeau d’orgueil :

Ou bien c’est la câline et mortelle paresse,
Ensorceleuse pis qu’une vieille maîtresse
Qui te couche à son lit drapé comme un cercueil.

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Commentaires

  1. À l'heure où plus d'un s'endort,
    À boire l'on me convie ;
    Loin de la foule asservie,
    Savourons des alcools forts.

    L'ivresse prend son essor,
    Les poèmes prennent vie.
    Pour la muse inassouvie,
    Des verres pleins à ras bord.

    Ah, muse de la taverne,
    Le grand prix je te décerne,
    Dont tu peux tirer orgueil.

    Tu as vaincu ma paresse
    Cent fois mieux qu'une maîtresse
    Ou que la peur du cercueil.

  2. Logis de paresse
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    Au coeur de ce palais se trouve un troll qui dort,
    Lui qui des commensaux bien rarement convie ;
    Jamais ne fut à rien sa personne asservie,
    Pour se débrouiller seul il est bien assez fort.

    Une idée en son coeur parfois prend son essor,
    Qui n’est pas d’un grand poids, et dont courte est la vie;
    J’entends récriminer sa muse inassouvie,
    Il laisse l’idée morte à son funèbre sort.

    Il fera tout de même un tour à la taverne,
    Lui qui parmi les vins les plus subtils discerne,
    Mais de ce grand talent ne tire nul orgueil.

    La sagesse est chez elle au logis de paresse,
    Ce vieillard ne prendra jamais d’autre maîtresse;
    Il s’en séparera pour dormir au cercueil.

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