Poème 'Rémanence' de René CHAR

Rémanence

René CHAR

De quoi souffres-tu ?
Comme si s’éveillait dans la maison sans bruit l’ascendant d’un visage qu’un aigre miroir semblait avoir figé.Comme si la haute lampe et son éclat abaissé sur une assiette aveugle, tu soulevais vers ta gorge serrée la table ancienne avec ses fruits.
Comme si tu revivais tes fugues dans la vapeur du matin à la rencontre de la révolte tant chérie, elle qui su, mieux que toute tendresse, te secourir et t’élever.
Comme si tu condamnais, tandis que ton amour dort, le portail souverain et le chemin qui y conduit.
De quoi souffres-tu ?
De l’irréel intact dans le réel dévasté ?
De leurs détours aventurés, cerclés d’appel et de sang ?
De ce qui fut choisi et ne fut pas touché ?
De la rive du bon au rivage gagné ?
Du présent irréfléchi qui disparaît ?
D’une étoile qui s’est la folle, rapprochée et qui va mourir avant moi ?

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Commentaires

  1. Immanence
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    Comme si s'éveillait au miroir un silence,
    Comme si d'une lampe un rayon abaissé
    Sur la table posait un hasardeux tracé,
    Le mystère régnait sur la poussière dense.

    L'atmosphère du lieu se chargea d'immanence
    Quand s'y mit à souffler un courant d'air glacé,
    Que le long d'un mur jaune un rat vint à passer
    Et qu'au-dehors, le ciel prit d'étranges nuances.

    Le jardin, de longtemps, ne promet de récolte ;
    Au coeur du solitaire a terni la révolte
    Ainsi que d'un portrait s'estompent les contours.

    Le vieillard, en ces lieux, d'un je ne sais quoi souffre,
    Comme un passant qui doit marcher le long d'un gouffre,
    Car il n'ose tenter l'aventureux détour.

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