Poème 'Sur le Pont-Vieux' de José-Maria de HEREDIA dans 'Les Trophées'

Sur le Pont-Vieux

José-Maria de HEREDIA
Recueil : "Les Trophées"

Antonio di Sandro orefice.

Le vaillant Maître Orfèvre, à l’oeuvre dès matines,
Faisait, de ses pinceaux d’où s’égouttait l’émail,
Sur la paix niellée ou sur l’or du fermail
Épanouir la fleur des devises latines.

Sur le Pont, au son clair des cloches argentines,
La cape coudoyait le froc et le camail ;
Et le soleil montant en un ciel de vitrail
Mettait un nimbe au front des belles Florentines.

Et prompts au rêve ardent qui les savait charmer,
Les apprentis, pensifs, oubliaient de fermer
Les mains des fiancés au chaton de la bague ;

Tandis que d’un burin trempé comme un stylet,
Le jeune Cellini, sans rien voir, ciselait
Le combat des Titans au pommeau d’une dague.

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Commentaires

  1. Sagesse du boeuf
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    Le boeuf dort au plafond quand sonnent les matines,
    Son museau est de sable, un digne et sombre émail.
    Le barde, abandonnant son modeste travail,
    S’en vient lui réciter des sentences latines.

    Ici, le réfectoire, ou très humble cantine,
    Rassemble les chercheurs en un tiède bercail ;
    Chaque fenêtre arbore un éclat de vitrail
    Et le cuistot y grille une côte argentine.

    La magie de la salle a de quoi nous charmer ;
    À deux ou trois copains, l’on peut s’y enfermer
    Pour goûter du vin sombre et quelques propos vagues.

    Comme il descend, ce vin ! Mieux que du petit lait ;
    L’existence, bientôt, n’aura plus rien de laid,
    Nous la prendrons, c’est sûr, comme une bonne blague.

  2. Plume de boeuf
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    L’écriture du boeuf, elle est presque enfantine,
    C’est la calligraphie qu’on enseigne au bétail ;
    Il en fait cependant un fort joli travail,
    Rendant parfois hommage à des sources latines.

    Il trace une prière à Sainte Clémentine
    Mais que je ne saurais vous citer en détail ;
    Ensuite, d’un proverbe, il orne un éventail,
    Je crois qu’il le tira d’une oeuvre byzantine.

    De ta plume, cher Boeuf, nous voilà tous charmés,
    Par laquelle ton art est ce jour affirmé ;
    La Muse tient ta main, qui jamais ne divague.

    L’étable te convient plus qu’un vaste palais,
    Car la simplicité, depuis toujours, te plaît ;
    Tu es un Barde-Boeuf, ce n’est pas une blague.

  3. Ambiboeuf
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    L’ambiboeuf n’est jamais servi dans les cantines
    Ni dans les restaurants ; et j’ajoute un détail,
    Il ne faut surtout pas lui donner du travail,
    Sinon de commenter la poésie latine.

    Il n’utilise point sa force éléphantine,
    Car il ne voudrait pas être un épouvantail ;
    Mais il aime tracer des phrases d’éventail,
    On y voit s’exprimer son âme byzantine.

    Ce bovin remarquable est de cornes armé,
    Mais de le constater, ne sois pas alarmé ;
    Il ne s’en sert jamais, pas même quand il drague.

    Notre roi volontiers l’accueille en son palais,
    Comme un grand du royaume, et non comme un valet ;
    Il vaut bien un bouffon pour raconter des blagues.

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José-Maria de HEREDIA

Portait de José-Maria de HEREDIA

José-Maria de Heredia (né José María de Heredia Girard 1842-1905) est un homme de lettres d’origine cubaine, naturalisé français en 1893. En tant que poète, c’est un des maîtres du mouvement parnassien, véritable joaillier du vers. Son œuvre poétique est constituée d’un unique recueil, « Les... [Lire la suite]

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