Poème 'Un peintre' de José-Maria de HEREDIA dans 'Les Trophées'

Un peintre

José-Maria de HEREDIA
Recueil : "Les Trophées"

A Emmanuel Lansyer.

Il a compris la race antique aux yeux pensifs
Qui foule le sol dur de la terre bretonne,
La lande rase, rose et grise et monotone
Où croulent les manoirs sous le lierre et les ifs.

Des hauts talus plantés de hêtres convulsifs,
Il a vu, par les soirs tempétueux d’automne,
Sombrer le soleil rouge en la mer qui moutonne ;
Sa lèvre s’est salée à l’embrun des récifs.

Il a peint l’Océan splendide, immense et triste,
Où le nuage laisse un reflet d’améthyste,
L’émeraude écumante et le calme saphir ;

Et fixant l’eau, l’air, l’ombre et l’heure insaisissables,
Sur une toile étroite il a fait réfléchir
Le ciel occidental dans le miroir des sables.

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Commentaires

  1. Autour de la lune
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    La lune est survolée par deux monstres pensifs
    Dont la conversation est en langue bretonne ;
    Le contenu en est bien terne et monotone,
    Car nos deux compagnons sont des êtres poussifs.

    Ils éclatent parfois d'un rire compulsif,
    Comme des écoliers retrouvant en automne
    Un maître plein d'humour, dont l'esprit les étonne,
    Et qu'ils vont savourant son verbe corrosif.

    Ils pensent que le ciel est trop immense, et triste ;
    Ils le préféreraient revêtu d'améthyste,
    Ou bien, à la rigueur, de quelques beaux saphirs.

    Volez sans vous lasser, monstres insaisissables ;
    Bavardez en breton sous le grand ciel de sable,
    Qu'ici ne parcourt point le printanier zéphir.

  2. Petit lion-chevalier
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    Sur la piste pierreuse, il chemine, pensif,
    En se remémorant des légendes bretonnes ;
    Le paysage est terne et presque monotone,
    À peine y croise-t-on un vieux mulet poussif.

    Le chevalier n’a pas de gestes compulsifs,
    Il est rempli de paix, comme un arbre en automne,
    Prédateur plein d’humour, dont l’esprit nous étonne,
    Chevalier bien tranchant, petit lion corrosif.

    Il croit que le désert est trop immense, et triste ;
    Il le préférerait avec de vertes pistes
    Ou bien, à la rigueur, des bases de loisirs.

    Marche sans te lasser, héros insaisissable ;
    La trace te suivra de tes pieds dans le sable,
    Effacée cependant par un traître zéphir.

  3. Ambimatrone
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    La grande ambimatrone a des regards pensifs,
    Surtout quand elle écoute une chanson bretonne
    Dont le langage simple et le son monotone
    Sont portés dans les airs par un barde poussif.

    Tu ne lui verras pas de gestes compulsifs,
    La paix règne en son âme, et la brise d’automne ;
    Elle vit sans émoi, presque rien ne l’étonne,
    Elle qui ne craint pas les discours corrosifs.

    La grande ambimatrone est grave, mais pas triste ;
    La noirceur en son coeur jamais on ne dépiste
    Ou bien, à la rigueur, à titre de de loisir.

    J’aime bien rencontrer cet être insaisissable ;
    Dans les jours où ma vie coule comme du sable,
    Sa présence apaisante est comme un frais zéphir.

  4. Mur de la friche
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    J’aime la pierre calme et le lierre pensif
    Qui joliment prospère en la douceur bretonne ;
    Le corbeau les salue de son cri monotone,
    Un auvent sert d’abri pour un vieillard poussif.

    Il compose un sonnet, c’est son jeu compulsif,
    Lui qui de l’existence a dépassé l’automne ;
    Ses proches font avec, et plus ne s’en étonnent,
    Ce n’est qu’un passe-temps, le labeur d’un oisif.

    Sa carrière est finie, ce dont il n’est pas triste ;
    Ça lui donne le temps de suivre d’autres pistes
    Et d’être un sybarite, un homme de loisir.

    Il n’a jamais tracé de vers impérissables,
    Il est souvent conscient d’écrire sur du sable,
    Lui qui d’être quelqu’un n’eut jamais le désir.

  5. Révélation

    Accoudé au comptoir, le « quinqua » boit, pensif,
    Il rêve de partir sur une île bretonne,
    Loin de son existence en tous points monotone ;
    « Métro, boulot, dodo », il se sent si poussif !

    Il tapote le zinc, un geste compulsif,
    Réalisant qu’il est, de sa vie, à l’automne,
    D’y penser, seulement, cela un peu l’étonne,
    Pour prendre du recul, mieux vaut rester oisif.

    Soudain, un pèlerin, devant son regard triste,
    L’entraîne à emprunté, que lui, la même piste,
    Une fois en chemin, ils discutent à loisir.

    L’échange le convainc de fuir le périssable,
    Qu’un vent nous portera comme des grains de sable,
    Que de trouver l’amour, c’est être en son désir.

    misquette.wordpress.com

  6. Bravo ! Belles compositions (pastiches, à la manière de..., je ne sais pas comment il faut les appeler) pleines d'humour et de légèreté brodant sur une étoffe parnassienne :-)

  7. Merci pour votre lecture bienveillane !

  8. « bienveillante », pardon.

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José-Maria de HEREDIA

Portait de José-Maria de HEREDIA

José-Maria de Heredia (né José María de Heredia Girard 1842-1905) est un homme de lettres d’origine cubaine, naturalisé français en 1893. En tant que poète, c’est un des maîtres du mouvement parnassien, véritable joaillier du vers. Son œuvre poétique est constituée d’un unique recueil, « Les... [Lire la suite]

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