Plus ultra
L’homme a conquis la terre ardente des lions
Et celle des venins et celle des reptiles,
Et troublé l’Océan où cinglent les nautiles
Du sillage doré des anciens galions.Mais plus loin que la neige et que les tourbillons
Du Ström et que l’horreur des Spitzbergs infertiles,
Le Pôle bat d’un flot tiède et libre des îles
Où nul marin n’a pu hisser ses pavillons.Partons ! Je briserai l’infranchissable glace,
Car dans mon corps hardi je porte une âme lasse
Du facile renom des conquérants de l’or.J’irai. Je veux monter au dernier promontoire,
Et qu’une mer, pour tous silencieuse encor,
Caresse mon orgueil d’un murmure de gloire.
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José-Maria de HEREDIA
José-Maria de Heredia (né José María de Heredia Girard 1842-1905) est un homme de lettres d’origine cubaine, naturalisé français en 1893. En tant que poète, c’est un des maîtres du mouvement parnassien, véritable joaillier du vers. Son œuvre poétique est constituée d’un unique recueil, « Les... [Lire la suite]
Trop d'espace au grand Nord, et ça nous étonnait.
On eut beau calculer, mesurer, rien à faire,
On eut beau repenser le rayon de la sphère,
Au calcul, le réel jamais ne pardonnait.
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Lorsque Néanderthal là-bas se promenait,
Il se disait, pensif: "Quelque chose interfère
Sans doute avec l'espace, une curieuse affaire
Cosmologique ici, pour moi qui m'y connais".
*
Là où les méridiens se croisent en un point,
Un axe les pourfend, mais on ne le voit point,
Il est juste tracé aux rouleaux d'écriture.
*
Et cette anomalie est là depuis longtemps.
Le cosmos est un être obstiné, résistant
Et peu sensible au goût de la littérature.
Trinité du Cercle Polaire
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L’aurore boréale étale ses couleurs
Et le vent dit des mots qui n’ont rien de futile ;
Ici ne vivent point les pluvians fluviatiles,
Mais trois ours magiciens, trois sources de chaleur.
Eux qui de la banquise éloignent le malheur,
J’aime les inventions de leur esprit fertile ;
Ils agissent fort peu, ne font rien d’inutile,
Mais savent éloigner les démons harceleurs.
Buvant de l’eau de mer et mangeant de la glace,
D’arpenter ce décor leur âme n’est point lasse,
Ils sont les trois gardiens de l’océan sans bords.
Voici le tavernier qui leur apporte à boire,
C’est pour triquer avec leur vieux cousin, le porc
Qui sa plume brandit pour proclamer leur gloire.