Poème 'Vieille Clameur' de Robert DESNOS dans 'Les Ténèbres'

Vieille Clameur

Robert DESNOS
Recueil : "Les Ténèbres"

Une tige dépouillée dans ma main c’est le monde
La serrure se ferme sur l’ombre et l’ombre met son œil à la serrure
Et voilà que l’ombre se glisse dans la chambre
La belle amante que voila l’ombre plus charnelle que ne l’imagine
perdu dans son blasphème le grand oiseau de fourrure blanche
perché sur l’épaule de la belle,
de l’incomparable putain qui veille sur le sommeil
Le chemin se calme soudain en attendant la tempête
Un vert filet à papillon s’abat sur la bougie
Qui es-tu toi qui prends la flamme pour un insecte
Un étrange combat entre la gaze et le feu
C’est à vos genoux que je voudrais passer la nuit
C’est à tes genoux
De temps à autre sur ton front ténébreux et calme
en dépit des apparitions nocturnes,
je remettrai en place une mèche de cheveux dérangée
Je surveillerai le lent balancement du temps et de ta respiration
Ce bouton je l’ai trouvé par terre
Il est en nacre
Et je cherche la boutonnière qui le perdit
Je sais qu’il manque un bouton à ton manteau
Au flanc de la montagne se flétrit l’edelweiss
L’edelweiss qui fleurit dans mon rêve et dans tes mains quand elles s’ouvrent :

Salut de bon matin quand l’ivresse est commune
quand le fleuve adolescent descend d’un pas nonchalant
les escaliers de marbre colossaux
avec son cortège de nuées blanches et d’orties
La plus belle nuée était un clair de lune récemment transformé
et l’ortie la plus haute était couverte de diamants
Salut de bon matin à la fleur du charbon
la vierge au grand cœur qui m’endormira ce soir
Salut de bon matin aux yeux de cristal aux yeux de lavande aux yeux de gypse
aux yeux de calme plat aux yeux de sanglot aux yeux de tempête
Salut de bon matin salut
La flamme est dans mon cœur et le soleil dans le verre
Mais jamais plus hélas ne pourrons-nous dire encore
Salut de bon matin tous ! crocodiles yeux de cristal orties vierge
fleur du charbon vierge au grand cœur.

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Commentaires

  1. Ce poème suggère que la femme aimée n'est qu'un rêve et est comparée à l’edelweiss, fleur vivace poussant en altitude. L'amour de la bien aimée est comparée au chant du monde. Ce texte invite le lecteur à ne pas chercher concrètement de sens à ce que le poète souhaite exprimer. Ce sont des métaphores qui animent le poème en lui accordant une liberté sans pareil. L'imagination, en lisant ce poème, amène à la conclusion qu'il est doux d'aimer un être et de le chérir.

  2. Ce poème est très mélancolique.

  3. Sagesse du rêveur
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    Robert qui entre et sort par le trou des serrures
    Se glisse dans la chambre et trouve un grand oiseau ;
    Puis il va reposer sous l'abri de roseaux,
    Quand de rose et de feu le ciel met sa parure.

    Et si tu veux savoir qui garde son sommeil :
    C'est l'orage du ciel, c'est le bruit des tempêtes,
    C'est l'univers dément qui grouille dans sa tête,
    Un cosmos onirique, à nul autre pareil.

    Robert, de bon matin, a l'ivresse commune
    Mais pas du tout vulgaire, il forge des récits
    Et le jardin, tout bas, lui adresse un merci,
    Robert est un rêveur, c'est toute sa fortune.

  4. Il est doux d'aimé et d'être aimé en retour

  5. Sagesse du charpentier
    ----------------

    Le charpentier dans la joie, dans la peine
    Voit un oiseau qui lentement descend,
    Puis il entend que l’archange puissant
    Parle à la vierge auprès d’une fontaine.

    Elle est rêveuse, elle semble lointaine,
    Mais que lui dit l’ange vêtu d’argent ?
    Et la colombe, alentour voltigeant,
    Qu’en pense-t-il ? Son âme est incertaine.

    L’apparition danse devant ses yeux,
    Lui qui sait bien qu’on ne peut pas voir Dieu :
    Son âme doute, et se croit abusée.

    Or, quelques mots venus du ciel d’azur
    L’ont rassuré, son coeur devient moins dur,
    Il a souri, sa crainte est apaisée.

  6. Par le trou de la serrure
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    Trou de serrure, on y découvre un monde
    Orné de fleurs, embelli de chansons ;
    D’y regarder, ce n’est pas des façons,
    Pourtant notre âme en indulgence abonde,

    Car les humains sont des êtres qui sondent
    Le territoire auprès duquel ils sont ;
    Au grand jamais nous ne nous en lassons,
    Nous explorons les cachettes profondes.

    Comment savoir où la porte conduit,
    Comment juger de ce qui se produit
    En cet endroit que les rayons traversent ?

    Les chants joyeux, les entraînants refrains
    Semblent issus d’une gaîté sans frein
    Qui dans nos coeurs par ce trou se déverse.

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